C’est quoi l’obsolescence programmée ?

L’obsolescence programmée est une pratique qui vise à faire en sorte de délibérément réduire la durée de vie d’un produit afin d’inciter à son remplacement. Il s’agit d’un délit en France depuis 2015. La loi française définit l’obsolescence programmée comme suit : « l’ensemble des techniques par lesquelles un metteur sur le marché vise à réduire délibérément la durée de vie d’un produit pour en augmenter le taux de remplacement« .

Les techniques qui sont caractéristiques du délit d’obsolescence programmée peuvent inclure l’introduction volontaire d’une défectuosité, d’une fragilité, d’un arrêt programmé ou prématuré, d’une limitation technique, d’une impossibilité de réparer ou d’une non-compatibilité.

En France, il existe une association, Halte à l’Obsolescence Programmée, qui permet de lutter contre ce phénomène, fondée notamment par Laetitia Vasseur et Samuel Sauvage. Elle milite activement pour une meilleure conception des produits (notamment via l’écoconception) mais aussi pour des produits réparables ou réemployables.

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Pour aller plus loin

Il semble que la plus ancienne trace de l’expression «planned obsolescence» soit attribuée à Bernard London, un agent immobilier américain qui serait l’auteur, en 1932, d’un petit essai appelé Ending the depression through planned obsolescence (l’obsolescence planifiée pour en finir avec la grande dépression).

Dans cet ouvrage, il propose au gouvernement américain de contrôler la production et l’obsolescence de tout type de produits manufacturés ou agricoles. Ainsi chaque produit aurait une date limite connue de tous et, de fait, l’industrie serait en permanence en train de produire de nouveaux biens que les consommateurs seraient dans l’obligation d’acheter puisque les anciens sont détruits lorsqu’arrive la fatidique date. Pour lui, c’est le moyen idéal de créer une sorte de circuit fermé pour empêcher les crises économiques. Un point de vue discutable aujourd’hui, mais plutôt ingénieux à l’époque.

Dans les années cinquante, la notion d’obsolescence programmée est ensuite reprise dans le monde de la publicité en utilisant la nouveauté comme argument de vente. Cette méthode permet de rendre artificiellement obsolètes certains produits et incitent les consommateurs à remplacer leurs objets encore fonctionnels par des objets plus récents et plus à la mode.

Mais aujourd’hui, les cas d’obsolescence programmée ont dépassé ce stade et se basent sur des mécanismes encore plus sophistiqués, donnant lieu à au moins 5 grandes typologies d’obsolescence qu’il convient de combattre.

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5 types d’obsolescence programmée

En fonction des secteurs et des produits, plusieurs typologies d’obsolescence programmée existent aujourd’hui. Certains cas proviennent directement de la conception des produits. C’est-à-dire que les fabricants peuvent intentionnellement créer des produits qui vont se dégrader au bout de quelques années ou au bout d’un certain temps d’utilisation. La conception des collants est un très bon exemple de ce type d’obsolescence : 70% des femmes affirment que leurs collants ne durent pas plus de 6 utilisations alors qu’historiquement, le bas en nylon était extrêmement robuste et résistant.

Parfois, certaines défaillances peuvent même être crées artificiellement. C’est le cas de ce qu’on appelle L’obsolescence par incompatibilité. On retrouve cette technique dans le domaine de l’IT et souvent côté logiciel. L’idée est de rendre un produit incompatible avec des versions ultérieures. Le consommateur est alors obligé de racheter un appareil plus récent pour pouvoir continuer d’accéder à ses services.

Il y aussi l’obsolescence indirecte. Elle consiste à rendre obsolètes des produits qui sont encore fonctionnels. Cela peut être par exemple des chargeurs de téléphone qui ne sont plus adaptés à de nouveaux modèles. Cela passe aussi par l’arrêt de la production de certaines pièces détachées qui empêche toute possibilité de réparation. Il y a également des marques, dans l’électronique ou l’informatique, qui rendent leur appareils impossibles à réparer soi-même.

Enfin, on retrouve des cas spécifiques d’obsolescence par péremption. Dans le domaine alimentaire, les dates de péremption sont décidées par les producteurs qui, parfois, les réduisent pour inciter à l’achat de nouvelles denrées alimentaires. Et ce alors que les produits sont encore consommables. Cette notion entraîne un vaste gaspillage alimentaire. Lucie Basch, la fondatrice de l’appli antigaspillage Too Good To Go nous expliquait récemment le combat qu’elle mène pour modifier ces comportements vis-à-vis des dates de péremption.

Pour terminer, le monde de la publicité continue de jouer sur ce qu’on appelle L’obsolescence esthétique. Une pratique facile qui joue sur la psychologie afin d’inciter les consommateurs à trouver un objet vieux ou démodé.

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obsolescence programmée


L’économie circulaire pour mettre fin à l’obsolescence programmée ?

Aujourd’hui, notre modèle économique et social est encore largement basé sur le concept de la surconsommation et de l’injonction à la croissance. Dans ce modèle, il est indéniable que l’obsolescence programmée agit comme un carburant pour motiver producteurs et consommateurs au renouvellement permanent. À l’image de ce qu’avait anticipé Bernard London dans les années 30.

Ce modèle est pourtant le plus incompatible des modèles au regard de l’urgence climatique. Outre le fait que l’obsolescence programmée pèse sur le pouvoir d’achat, elle renforce aussi des impacts environnementaux négatifs. En termes de production de déchets et d’incitation au gaspillage, notamment. Mais également dans l’utilisation de ressources finies. Par exemple, il faut 2 700 litres d’eau pour fabriquer un tee-shirt dont la durée de vie, à l’échelle mondiale, est estimée à 35 jours. Et il en va de la même logique pour l’extraction des métaux rares nécessaires à la conception de smartphones que nous changeons en moyenne tous les 18 mois.

Donc, si le modèle économique est l’une des causes de l’obsolescence programmée, c’est qu’il faut changer de modèle économique. Dans le cadre de la transition écologique, l’économie circulaire apparaît comme un modèle qui pourrait se substituer à nos façons imparfaites de produire et consommer. L’économie circulaire se base en effet sur 3 piliers :

  • Réduire la quantité de matières premières pour fabriquer des produits
  • Mettre au point des produits plus durables et réparables
  • Recycler les déchets pour les réutiliser dans d’autres productions.
  • Cette nouvelle économie mise donc énormément sur la création de nouvelles filières professionnelles dans le domaine du réemploi et du recyclage. Elle se base aussi sur des modèles de productions durables et raisonnés. À l’instar du principe de l’éco conception par exemple, ou encore du reconditionnement de produits électroniques comme les téléphones et les tablettes.

    L’économie circulaire pourrait donc mettre fin à la dominance de l’obsolescence programmée mais elle dépend de deux conditions. La première, c’est une législation contraignante pour les producteurs. La seconde, c’est la possibilité de trouver des business modèles durables autour de ces problématiques nouvelles. À ce sujet, l’exemple du groupe SEB, qui place la réparabilité au coeur de son modèle économique depuis quelques années, est particulièrement intéressant à suivre.

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