Avec l’obligation du tri des déchets organiques à partir de janvier 2024, la production de biogaz via la méthanisation possède un gigantesque potentiel. Concrètement, on estime qu’une tonne de biodéchets peut produire 100m3 de biométhane donc, avec un gisement national de déchets organiques estimé entre 12 et 18 millions de tonnes par an, la méthanisation à de l’avenir.

Sur le papier, la production de biométhane est un concept extrêmement intéressant pour la transition écologique. Dans une logique propre à l’économie circulaire, ce procédé permet de valoriser les biodéchets et les effluents d’élevage afin d’en tirer deux choses. D’abord, du biogaz qui peut être injecté dans le réseau de gaz domestique où servir à alimenter des véhicules roulant au bioGNV. Ensuite, un digestat qui permet de fertiliser les cultures et venir en complément ou en substitut des engrais traditionnels. On transforme ainsi des déchets en ressources et cela permet aux agriculteurs de diversifier leurs revenus.

Le secteur est en plein essor. Au 1er janvier 2023, on dénombrait 515 unités de méthanisation dans l’hexagone, dont 430 raccordées au réseau GRDF. Mais l’attrait pour cette technologie entraîne aussi des excès. Pollution des sols et des cours d’eau, intoxication et même explosion : ces dernières années, la production de biométhane par le monde agricole a été la cause de diverses pollutions environnementales en France et à l’étranger.

Par exemple, en août 2020, le méthaniseur industriel de Châteaulin, dans le Finistère, a déversé 400 m³ de digestat dans un cours d’eau. Un accident qui a rendu impropre à la consommation l’eau du robinet pour les habitants d’une cinquantaine de communes aux alentours. On retrouve des exemples de pollution similaires au niveau du lac de Lourden, dans les Landes, où encore dans les Ardennes où un méthaniseur a entraîné la pollution d’un cours d’eau sur 4,5 kilomètres.

C’est notamment la course à la productivité et la volonté de certains porteurs de projets de réaliser des économies d’échelle en proposant des projets toujours plus grands qui est la cause de ces excès. Dans les Pays de la Loire, par exemple, il existe un projet de méthanisation XXL qui souhaitait regrouper plus de 200 exploitations agricoles, là où les premières unités étaient généralement constituées localement par des grappes de 4 à 5 agriculteurs.

Or, avec l’apparition de ces projets XXL, c’est tout l’intérêt écologique et local de la méthanisation qui perd de sa valeur, notamment en raison du transport des biodéchets sur de longues distances. Ils entraînent également une augmentation des risques pour l’environnement autant qu’une augmentation des nuisances pour les riverains. D’ailleurs, près du tiers des projets de méthanisation liés aux biodéchets ne voient pas le jour pour des raisons d’acceptabilité.

Alors, pour faire face au besoin de valoriser les biodéchets et préserver l’intérêt écologique du biométhane, la startup française Tryon s’est lancée sur un autre créneau : la production de micro-unités de méthanisation.

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De petites unités pour une valorisation locale et vertueuse

Plutôt que de créer des méthaniseurs toujours plus grands, la micro-méthanisation est un axe qui devrait, au contraire, permettre à une multitude de nouveaux petits producteurs de valoriser directement leurs déchets organiques.

La startup a donc créé une unité à petite échelle, qui peut être facilement installée, avec une emprise au sol restreinte. « Notre objectif est de remettre en place une gestion locale et donc économique et vertueuse de ces restes alimentaires considérés à tort comme des déchets. Cela permettra de réduire la logistique de collecte, de créer des emplois non délocalisables et d’assurer une autonomie territoriale sur les sujets énergétique et de fertilisant agricole » explique Jimmy Colomies, Président de la structure.

L’objectif de l’entreprise est notamment de réduire jusqu’à 90% le trafic généré par les camions venant déposer les déchets par rapport à une unité centralisée. Par ailleurs, elles permettent de réduire les risques environnementaux (pas de matière à l’air libre, faible emprise au sol). Baptisées Modul’O, ces petites unités s’adressent notamment aux collectivités locales, ainsi qu’à la restauration, aux grandes et moyennes surfaces voire aux professionnels de l’industrie agroalimentaire.

Créée en 2015 par Jimmy Colomies et Sébastien Gacougnolle, Tryon a installé son premier Modul’O l’année dernière, dans les Yvelines, à Carrières-sous-Poissy. Elle injecte son biogaz sur le réseau GRDF depuis le 16 février 2022 et devrait atteindre une capacité annuelle de traitement de 8 000 tonnes de biodéchets. Suite à cette preuve de concept, l’entreprise est en phase d’accélération commerciale en ce moment, et a récemment opéré un tour de financement de près de 2M€ via la plateforme Lita.co. En 2019, la startup avait déjà finalisé une levée de fonds d’1M€ auprès de SWEN Capital et Starquest Capital.

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La valorisation des biodéchets, un marché d’avenir

En France, la valorisation des déchets organiques en compost et en biogaz est un marché qui s’étoffe ces dernières années dans le sillage de quelques entreprises pionnières comme Moulinot (qui a démarré son activité en 2013) où Les Alchimistes (depuis 2016).

Cela fait 6 ans que les producteurs non-ménagers de plus de 10 tonnes de biodéchets par an sont déjà soumis à l’obligation de tri à la source de cette ressource. Un seuil qui est passé à 5 tonnes par an au 1er janvier 2023 et qui deviendra obligatoire pour tout le monde en 2024.

Différents acteurs se sont positionnés sur le sujet avec des modèles assez similaires de collecte auprès des restaurants et des particuliers. La plupart misent sur la création de compost grâce à ces déchets organiques et optent pour un modèle économique lié à l’enlèvement des déchets plus qu’à leur valorisation. Il y a encore peu d’acteurs qui misent intégralement sur la méthanisation pour valoriser les biodéchets.

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