Stephan Martinez était lui-même restaurateur lorsqu’il a fondé Moulinot en 2013. Ayant conscience de l’impact des pratiques de son secteur et désireux de contribuer à la cause environnementale, il s’est formé au lombricompostage qu’il instaure dans son propre établissement avant de le déployer à plus grande échelle.
« Notre activité se base principalement sur la collecte de déchets alimentaires« , précise Caroline Hamel, chargée de communication au sein de l’entreprise. « Nous sommes basés à Stains où nous avons une plateforme de massification et de prétraitement des déchets alimentaires. C’est de là-bas que partent nos camions avec les collecteurs de biodéchets« . Au total, ce sont près de 1 700 points de collecte auxquels se rendent les collecteurs pour leurs tournées, à l’issue desquelles environ 1 500 tonnes de biodéchets sont collectées chaque mois.
La société prend également en charge les déchets collectés par d’autres organismes ayant mis en place un service de traitement similaire à celui de Moulinot comme les collectivités, les industries agro-alimentaires et les collecteurs privés. L’entreprise récupère ainsi les déchets alimentaires des restaurants mais également des restaurants collectifs, des bars, des écoles, collèges et lycées et des chaînes de restauration du type Buffalo Grill ou encore McDonald. La société se charge aussi d’assurer la collecte des biodéchets de l’Elysée et sera en charge de celle d’évènements tels que l’Ecotrail et les JO de 2024 qui se tiendront à Paris.
Au total, depuis la création de l’entreprise, ce sont 45 000 tonnes de déchets alimentaires qui ont été collectés par l’entreprise. Un succès pour Moulinot, qui s’est lancé dans cette voie 10 ans avant que cela ne devienne obligatoire pour tous les français : ce sera le cas au 01er janvier 2024.
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Le lombricompostage comme solution de revalorisation
Après la collecte, les déchets collectés par Moulinot sont ramenés à la plateforme de massification et de pré-traitement de Stains. Cette plateforme dispose d’une machine de déconditionnement ou de désemballage qui permet de séparer les déchets organiques des déchets indésirables tels que les sacs plastiques dans lesquels sont disposés les déchets mais également les erreurs de tri comme des fourchettes en plastiques, des gants ou des masques malencontreusement jetés dans la mauvaise poubelle.
Une autre partie de la plateforme sert au pré-traitement des déchets avant de les envoyer en méthanisation. « Nous faisons de la soupe organique. Nous avons des cuves sur place que nous faisons monter en température dans ce qu’on appelle un hygiéniseur. Ça tue les bactéries pathogènes et ensuite, il y a un camion-citerne qui vient récupérer cette soupe et qui l’emmène chez nos agriculteurs méthaniseurs partenaires qui eux en font du gaz vert« .
Une dernière étape est la valorisation des déchets alimentaires en compostage, ou plutôt en lombricompostage. Une autre partie de la collecte est acheminée à un autre site que la structure prend en charge et qui est dédiée à la production de composte à l’aide de lombrics. Ce compost, dont la production est à-même d’atteindre 36 000 tonnes par an, est ensuite commercialisé aux particuliers et professionnels, notamment via des enseignes de jardinage telles que Biocoop, Auchan ou Truffaut. Et depuis peu, l’entreprise propose également son digestat aux agriculteurs.
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Une levée de fonds de 18 millions d’euros en 2022
Moulinot a à cœur de contribuer à la filière de la valorisation des biodéchets dans sa région. C’est pourquoi elle privilégie le local en desservant seulement les commerces de la région Ile-de-France, là où se trouve ses deux plateformes de pré-traitement et de valorisation. Mais l’entreprise envisage d’étendre son service, notamment en province où l’une de ses structures est en passe de s’installer.
Ainsi, après avoir bâti un modèle complet en Ile-de- France, Moulinot projette l’ouverture de six nouvelles antennes sur le territoire français d’ici 2025. Une première implantation est d’ores et déjà prévue à Bordeaux dès la fin de l’année 2022. L’entreprise vient d’ailleurs d’officialiser, le 13 avril 2022, une levée de fonds de 18 millions d’euros réalisée auprès de la Banque des Territoires, Bpifrance, NovESS, MAIF Impact, BNP Paribas Asset Management, France Active et Sycomore Impact Emploi.
« À travers cette levée de fonds, notre objectif est d’atteindre 500 emplois créés et de bénéficier d’une capacité de traitement de plus de 300 000 tonnes de biodéchets par an » précise ainsi Stéphan Martinez. Moulinot pourrait ainsi devenir l’un des acteurs de référence de la valorisation des biodéchets sur le territoire, aux côtés d’autres acteurs comme Les Alchimistes, qui semblent également en voie d’industrialiser leur concept.
En France, nous produisons collectivement 12 millions de tonnes de biodéchets chaque année qui peuvent être valorisés en biométhane ou en compost. Aujourd’hui, leur valorisation est obligatoire pour certaines entreprises mais cela le sera pour tout le monde (collectivités, entreprises et particuliers) à partir du 01er janvier 2024. Une évolution législative qui pousse d’ailleurs d’autres acteurs du secteur à se développer. Ainsi, la startup Les Alchimistes a levé 10M€ début 2023 pour accroître son maillage territorial et proposer sa solution de valorisation des biodéchets dans toutes les villes moyennes de France.