Il y a bientôt 1 an et demi – le 23 avril 2018 – Brune Poirson, secrétaire d’État auprès de la ministre de la Transition écologique et solidaire, présentait sa feuille de route pour l’économie circulaire. Une feuille en 50 points qui devait servir de base à un projet de loi devant faire rentrer la France de plein pied dans une nouvelle dimension. Celle où anti-gaspillage et zéro déchet sont les nouvelles normes en matière de production et de consommation.

Il faut dire que les ambitions affichées par le gouvernement, via la voix de Madame Poirson, sont relativement élevées. D’ici 2025, le pays devrait ainsi diminuer de 30% sa consommation de ressources naturelles, réduire de 50% sa production de déchet et tendre vers les 100% de plastique recyclé (soit 5 fois plus qu’aujourd’hui).

Des ambitions élevées, notamment vis à vis des mesures présentées dans la feuille de route. Si l’on peut souligner des points symboliques et intéressants, à l’image de l’indice de réparabilité ou encore du retour de la consigne, il y a fort à parier que la France ne soit pas au rendez-vous de ses engagements dans 6 ans. Cependant, en guise de première étape, soulignons le fait que le projet de loi anti-gaspillage porté par Madame Poirson vient d’être adopté au sénat. Il sera désormais débattu prochainement à l’Assemblée Nationale.


Des mesures phares pour éviter les gaspillages

« Cette adoption au Sénat en première lecture est une première étape importante pour cette loi anti-gaspillage que le Gouvernement souhaite bénéfique pour tous les Français dans leur quotidien » précise Brune Poirson.

En effet, l’examen de ce projet de loi précisément intitulé « anti-gaspillage pour une économie circulaire » a permis l’adoption de plusieurs mesures relatives à la préservation de nos ressources, qui seront encore débattues à l’Assemblée nationale. Les sénateurs ont ainsi entérinés les points suivants :


Interdiction de l’élimination des produits neufs invendus

Pour que les producteurs, importateurs et distributeurs, y compris pour la vente à distance, soient obligés de réemployer (incluant le don), de réutiliser ou de recycler les invendus de produits non alimentaires neufs. Ce mécanisme existait déjà avec les produits alimentaires, donnant la possibilité à plusieurs entreprises et associations de réduire le gaspillage et de fournir des produits aux plus démunis. Parmi les structures les plus connues à ce sujet figurent par exemple les start up Phénix et Comerso.


Indice de réparabilité

Mesure phare de ce projet de loi, l’indice de réparabilité impose qu’une étiquette claire soit apposée sur les produits électriques et électroniques, permettant ainsi de savoir si le produit est facilement réparable, difficilement réparable ou non réparable. Une mesure qui vise notamment à réduire l’obsolescence programmée et à encourager les particuliers à réparer ou faire réparer leurs objets plutôt qu’à les jeter.


Disponibilité des pièces détachées

Et pour que l’indice de réparabilité soit efficace et pertinent, encore faut-il que les pièces détachées soient disponibles. Ainsi, la loi « antigaspillage » implique que les réparateurs de meubles et d’équipements électriques et électroniques soient dans l’obligation de fournir des pièces détachées ; et que les pièces détachées soient disponibles plus rapidement.


Obligation du logo Triman

Les consignes de tri sur le territoire sont terriblement compliquées et les différents logo sur les produits sont trompeurs. Le logo comportant deux flèches verte et blanche – qui n’implique pas qu’un produit soit recyclable, par exemple – sera supprimé. À l’inverse, les consommateurs vont bénéficier d’une harmonisation du logo Triman, qui sera accompagné d’une consigne de tri plus claire sur tous les produits.

Brune Poirson


Le retour de la consigne rejeté par les sénateurs

C’est la mesure la plus discutée et la plus symbolique de ce projet de loi. Et malgré les réticences des professionnels du recyclage, l’ambition du Gouvernement reste intacte pour porter un projet de consigne pour recyclage à laquelle serait adossée une consigne pour réemploi afin que la France puisse atteindre les objectifs écologiques fixés par l’Union européenne : c’est à dire atteindre 90% de bouteilles en plastique collectées d’ici à 2029.

D’autant qu’à ce sujet, les projets innovants pour la collecte des déchets, qui s’appuient en grande partie sur des systèmes de consigne, sont entrain de se développer massivement sur le territoire. Cependant, les sénateurs ont rejeté cette mesure, considérant qu’il s’agissait d’une perte de revenus pour les collectivités locales.

L’ambiguïté du texte concernant la différence entre une consigne pour réemploi et une consigne pour recyclage (le fait d’aborder les deux possibilités dans un même intitulé ne facilite pas les choses) pose ainsi de sérieux problèmes aux maires et aux professionnels du recyclage.

Présente à Nantes aux 15ème assises nationales des déchets, Madame Brune Poirson est venue défendre son texte face à une assemblée d’élus locaux ouvertement remontés contre cette mesure. Nul doute que nous n’avons pas fini d’entendre parler de la consigne !