Une équipe de recherche franco-néerlandaise, incluant des scientifiques du Cirad, d’INRAE et de l’Université libre d’Amsterdam ont analysé 5 156 études et 54 554 expérimentations concernant la diversification des cultures. Des travaux qui portent ainsi sur 85 ans de travaux de recherche, plus de 120 types de cultures et 85 pays différents. « Jusqu’ici, la plupart des études étaient dispersées. Avec ce travail, nous synthétisons les impacts quantifiés de plus de 5 000 expérimentations de terrain, effectuées dans le monde entier, de 1936 à aujourd’hui » résume Damien Beillouin, chercheur au Cirad et premier auteur de la publication.

Et leurs conclusions viennent éclairer une nouvelle fois les bienfaits de la diversification des cultures : hausse de la production de 14%, hausse de la biodiversité de 25%, amélioration de la qualité de l’eau de 50% et de la qualité des sols de 11%. Sans compter une amélioration significative du contrôle des ravageurs et maladies (+63%).

La diversification des cultures ferait donc bel et bien partie des leviers pour réduire le recours aux intrants de synthèse. Des produits qui sont généralement utilisés par les exploitants agricoles pour optimiser leurs productions. « La plupart des agriculteurs ont une « aversion au risque » et ils justifient les traitements chimiques par des logiques économiques de court terme » explique ainsi Françoise Lescourret, directrice de recherche en agroécologie à INRAE. De fait, les techniques agroécologiques, comme la diversification, associées à ce que propose aujourd’hui la technologie pour un usage raisonné des intrants pourraient leur permettre de s’y retrouver.

Il existe 5 systèmes agricoles qui favorisent la diversification des cultures. Le premier est l’agroforesterie, qui consiste à associer une végétation ligneuse (arbres, arbustes et haies) au sein des pâtures ou des cultures (céréales, légumineuses, cultures maraîchères). Viennent ensuite les cultures associées qui consistent à cultiver plusieurs espèces différentes dans le même champ, soit en relais ou rotation (une culture vient après l’autre), soit en alternant des bandes au sein des parcelles voire, dans le cas des mélanges variétaux, en cultivant plusieurs variétés de la même espèce au sein d’une même parcelle. Et puis il y a enfin les cultures intermédiaires ou cultures de couvertures. Elles visent à cultiver des plantes à des fins agronomiques et environnementales en complément d’une culture principale.

A lire également : Eloi, un projet pour accélérer la transmission de fermes en agroécologie

culture de blé en agroforesterie
L’agroforesterie est une méthode de diversification des cultures qui présente de nombreux avantages pour les sols et la biodiversité


L’agroforesterie : meilleure technique agroécologique ?

Grâce à leur analyse poussée de l’ensemble des données expérimentales disponibles, les chercheurs du Cirad et de l’INRAE mettent en avant une hausse de la production sur les parcelles, associées à une hausse de la biodiversité et des services écosystémiques. D’après leurs résultats, la diversification entraîne également un meilleur contrôle des ravageurs et des maladies (amélioration de +63%), ce qui en fait un levier essentiel dans la quête d’une agriculture qui se passerait, à moyen-terme, des intrants de synthèse. Dans leurs résultats, ce sont notamment l’agroforesterie, les couverts végétaux et les cultures associées qui semblent les plus efficaces pour apporter ces résultats.

« Les systèmes agroforestiers améliorent la biodiversité associée d’environ deux tiers, contre un peu plus d’un tiers pour les rotations culturales, et moins d’un quart pour les systèmes sous couverture végétale » ajoute Damien Beillouin. « Les cultures associées et les mélanges variétaux ont, quant à eux, des impacts plus réduits, avec une hausse moyenne de 7 % et 2 % respectivement« . L’agroforesterie surpasse les autres techniques, en particulier pour la hausse de production associée (qui peut aller jusqu’à +35%) et l’amélioration de la qualité des sols. Une raison de plus de s’intéresser à cette pratique ainsi qu’à la plantation de haies en bordure des parcelles.

En revanche, les meilleurs résultats concernant le contrôle des ravageurs et des maladies sont en revanche obtenus par les systèmes sous couverture végétale (+ 125 %), suivis par les cultures associées (+ 66 %) et l’agroforesterie (qui reste particulièrement efficace sur ce sujet lorsque la technique choisie est la plantation de haies). « Les stratégies agroforestières sont aussi celles qui participent le plus au stockage de carbone dans les sols, et donc à l’atténuation du changement climatique » souligne Damien Beillouin qui ajoute que la teneur en carbone du sol est en moyenne 19 % supérieure dans les systèmes en agroforesterie par rapport aux parcelles sans arbres.

À lire également