Ce mardi 18 octobre, à l’occasion de leur visite au Mondial de l’automobile, Bruno Le Maire, ministre de l’Économie des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique et Roland Lescure, ministre délégué chargé de l’Industrie, ont annoncé leur soutien au développement du rétrofit de véhicules en France. Une enveloppe allant jusqu’à 20 millions d’euros devrait ainsi être débloquée pour aider les professionnels du rétrofit à financer des solutions industrielles qui permettront de passer cette technologie à l’échelle et d’en faire baisser le coût unitaire.

« Ce soutien indispensable pour la filière va permettre d’accélérer son déploiement national en termes de production et d’accessibilité pour nos concitoyens » précise Arnaud Pigounides, CEO de REV Mobilities, entreprise pionnière du retrofit de véhicules électriques en France. Cette annonce au profit du retrofit intervient alors que le Chef de l’Etat, Emmanuel Macron, a réaffiché cette semaine son souhait que la France puisse produire 1 million de véhicules électriques en 2027, 2 millions en 2030 et enfin 100% de véhicules électriques en 2035.

Dans ce cadre, le retrofit possède une place à part puisque la méthode pourrait permettre d’accélérer le déploiement de l’électromobilité tout en étant moins polluante que la production de véhicules neufs.

Mais pour cela, de nombreux chantiers attendent les professionnels de la filière. Du point de vue de la production, il leur faudra ainsi accélérer l’obtention d’homologations pour les principaux véhicules du marché et simplifier les relations entre rétrofiteurs, équipementiers, installateurs et constructeurs pour augmenter l’efficacité de la démarche.

Sur le plan commercial, il existe aussi plusieurs leviers : favoriser l’intégration de véhicules rétrofités dans les schémas d’autopartage en centres urbains ; intégrer les véhicules rétrofités dans les plans des collectivités pour simplifier la mise en œuvre des ZFE ou encore mobiliser la commande publique pour l’achat de véhicules rétrofités, afin de créer rapidement un effet d’échelle.

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Vers une électrification raisonnée du parc automobile

On rappelle que le secteur du transport est responsable de 30% des émissions de gz à effet de serre de la France et que l’usage de la voiture individuelle représente la moitié de ces émissions, suivis par le fret et la livraison. L’électrification du parc automobile souhaitée par les pouvoirs publics représente donc un véritable challenge pour lutter contre le réchauffement climatique.

À date, on estime que 39 millions de véhicules sont en circulation en France. Remplacer chaque véhicule thermique par un véhicule électrique ne représente pas en soi une solution idéale sur le plan climatique et sanitaire. Sur le plan sanitaire, puisque la voiture, même électrique, reste une source importante d’émissions de particules fines. Un avis de l’ANSES rendu en 2019 stipule d’ailleurs clairement que « les progrès technologiques ne seront pas suffisants pour améliorer la qualité de l’air tant que le trafic routier ne diminuera pas ».

Ensuite sur le plan écologique, le véhicule électrique n’est pas une solution miracle. On savait déjà que les hybrides rechargeables, par exemple, polluent largement plus que ce qui est prévu. Une récente étude de l’Ademe vient également confirmer quelques craintes sur la production de véhicules électriques en matière de climat. En cause, la « dette écologique » de ces véhicules qui, au départ, sont plus polluants que les véhicules thermiques en raison de la production des batteries lithium-ion. L’ADEME explique ainsi que « sur l’ensemble de la durée de vie, une voiture électrique roulant en France a un impact carbone deux à trois fois inférieur à celui d’un modèle similaire thermique, à condition que sa batterie soit de capacité raisonnable« .

Le poids et la taille des véhicules auront donc, demain, un impact majeur sur la véritable transition écologique du secteur automobile. Ce qu’expliquent les chercheurs de l’ADEME, c’est que des petites voitures avec des batteries légères représentent une véritable alternative écolo à la voiture thermique puisque leur « dette thermique » s’efface au bout de 15 000 kilomètres. Ce n’est, en revanche, pas le cas des SUV pour qui cette dette va s’effacer au bout de 100 000 kilomètres. Un message qui n’est d’ailleurs pour le moment pas bien reçu par les constructeurs si l’on en juge par le SUV 4L dévoilé par Renault cette semaine.

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Le retrofit, plus écologique que la production de nouveaux véhicules

En parallèle, plutôt que de remplacer chaque voiture par un modèle électrique – ce qui nécessiterait en France la production de 39 millions de véhicules électriques dans les prochaines années – le retrofit représente une solution intéressante : conserver l’essentiel du véhicule et ne changer que le bloc moteur.  Une récente étude de l’ADEME démontre d’ailleurs que la conversion d’un véhicule thermique en électrique est bien plus écologique que l’achat d’un véhicule électrique neuf. C’est notamment le cas des véhicules utilitaires pour entreprises et profesionnels.

D’après les calculs de l’ADEME, on éviterait ainsi 66 % d’émissions d’équivalent CO2 en rétrofitant un véhicule diesel, par rapport à son maintien ; et 47 % d’émissions de CO2 par rapport à l’achat d’un véhicule électrique neuf. Un avantage considérable qui permet en outre de prolonger la durée de vie des véhicules, ce qui s’inscrit pleinement dans la philosophie de la transition écologique, dont la finalité est de mettre fin à la politique du tout-jetable.

Le retrofit représente par ailleurs un secteur intéressant sur le plan économique. Les acteurs de la filière, réunis au sein de l’association AIRe, estiment que 3% du parc automobile français pourrait être retrofité dans les 10 ans, créant au passage 42 000 emplois pour un marché estimé à 24 milliards d’euros.

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