Selon une étude menée par des chercheurs de l’INRAE, de l’Inserm, de l’Université Sorbonne Paris Nord et de Solagro dont les résultats ont été publiés en Mars 2020, les recommandations nutritionnelles ont un impact positif sur la santé mais également sur l’environnement. L’objectif de cette étude était de suivre différents régimes alimentaires afin de comparer leurs impacts.
Si les recommandations nutritionnelles ont initialement été pensées pour des questions de santé, on observe parallèlement que ces recommandations, et plus globalement notre alimentation, ont des répercussions sur l’environnement.
En effet l’industrie agroalimentaire est aujourd’hui responsable d’environ 1/3 des émissions de gaz à effet de serre dans le monde. Elle contribue également à la pollution des eaux, des sols et nuit ainsi au bon développement de la biodiversité. Or les recommandations nutritionnelles, qui privilégient la consommation de végétaux et incitent à limiter les produits d’origine animale, incitent indirectement à réduire la pollution de ce secteur.
Il s’agit d’une preuve supplémentaire qu’il nous est possible de tendre vers une alimentation durable, notion définie par la FAO (l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture) comme « protectrice et respectueuse de la biodiversité et des écosystèmes, culturellement acceptable, accessible, économiquement juste et abordable, saine et équilibrée, répondant aux besoins humains, tout en optimisant les ressources humaines et naturelles »
La consommation moyenne de viande est passée de 56kg à 48kg par personne et par an entre 2007 et 2018.
Prévenir plus de 35 000 décès prématurés
Mises en place en 2001 dans le cadre du programme national nutrition santé – PNNS – ces recommandations incitent notamment les français à consommer plus de fruits et légumes, de produits laitiers et de pratiquer régulièrement une activité physique.
En 2017, elles prennent une dimension plus environnementale en incitant à réduire sa consommation de viande rouge, de charcuterie, et de favoriser les produits végétaux et l’agriculture biologique. Mais ces recommandations ont-elles un impact réel, notamment sur les aspects environnementaux et économiques ?
L’étude menée par les chercheurs français a permis de suivre des individus suivant trois régimes alimentaires différents : 1/aucune recommandation, 2/ un régime qui suit les recommandations de 2001, 3/ un régime qui suite celles de 2017.
D’un point de vue économique, le coût alimentaire final est supérieur d’environ 1€ par jour pour les deux groupes qui suivent les recommandations nutritionnelles par rapport à celui qui ne suit aucune recommandation.
Sur le plan sanitaire, l’application des recommandations nutritionnelles de 2017 permettrait de prévenir plus de 35 000 décès prématurés, soit 10% de plus que les recommandations de 2001.
Enfin, du point de vue environnemental, un régime basé sur les recommandations nutritionnelles de 2017 permet de réduire l’impact environnemental de 50% par rapport à un régime alimentaire qui ne suit aucune recommandation (3 indicateurs observés : émission de GES, ressources utilisées et occupation des sols).
En comparaison, les participants suivant les recommandations de 2001 ont réduit de seulement 25% leur impact sur l’environnement. Des résultats qui semblent donc révéler un co-bénéfice des recommandations nutritionnelles tant sur la santé que sur l’environnement. Pourtant, en matière d’alimentation, le comportement des consommateurs reste très paradoxal.
Un régime basé sur les recommandations nutritionnelles de 2017 permet de réduire son impact environnemental de 50% par rapport à un régime alimentaire qui ne suit aucune recommandation
Vers de nouveaux régimes alimentaires
En effet, selon l’INSEE, la consommation de produits industriels a augmenté en moyenne de 4,4% par an depuis 1960, entrainant une baisse de la consommation de fruits et légumes (d’où les premières recommandations nutritionnelles de 2001). Cependant, depuis quelques années, plusieurs études récentes montrent que les Français se soucient davantage de leur alimentation et sont beaucoup plus acteurs de celle-ci.
En découlent des changements de régimes alimentaires, notamment avec l’apparition et le développement des régimes vegans, végétariens ou encore flexitariens, ce qui consiste notamment à réduire à une proportion occasionnelle sa consommation de viande et poisson. Aujourd’hui près de 34% des Français se déclarent flexitariens. Un tel changement d’alimentation entraîne alors une baisse de la consommation moyenne de viande, passée de 56kg à 48kg de viande par personne et par an entre 2007 et 2018.
De plus, on observe en parallèle une hausse de la consommation des produits d’origine biologique. Selon un sondage d’Opinion Way, 81% des répondants disent acheter du bio. Enfin, la consommation de produits locaux, en circuits-courts, se développe également à grande échelle. Tout comme de plus en plus de consommateurs s’engagent auprès de marques qui mettent en avant le bien-être animal.
Ainsi, de plus en plus soucieux de leur alimentation, les consommateurs n’hésitent pas à recourir à différentes méthodes pour s’informer davantage sur les produits qu’ils achètent (traçabilité, filières, labels…).
Le coût final est supérieur d’environ 1€ par jour pour les deux groupes qui suivent les recommandations nutritionnelles par rapport à celui qui ne suit aucune recommandation.
L’information-produit, vecteur essentiel de notre alimentation
L’information liée à chaque produit est devenue un critère déterminant dans les choix alimentaires. Elle se matérialise par des labels, par le nutri-score ou encore par des informations et recommandations accessibles grâce à la technologie, et particulièrement aux systèmes de traçabilité mis en place par les industriels mais aussi par de nombreuses startups qui accélèrent l’adoption de ce comportements chez les consommateurs.
Aujourd’hui de nombreuses applications mobiles sont ainsi disponibles pour accompagner nos choix alimentaires. De la provenance des produits à la qualité nutritionnelle, elles accompagnent les consommateurs vers des choix plus sains pour la santé et l’environnement et préfigurent l’une des grandes tendances FoodTech de demain : la nutrition personnalisée.
Parmi les applications les plus utilisées par les consommateurs, on retrouve Yuka ou encore Scan’up, qui travaille par exemple sur la co-création de produits afin de lutter contre les aliments transformés. En plus de proposer un service d’information sur les ingrédients ou les qualités nutritionnelles, cette application permet ainsi de connaitre le degré de transformation d’un produit. L’objectif : sensibiliser sur l’hyper-industrialisation et tendre vers une alimentation contenant moins de produits transformés.
Mais pour tendre vers une meilleure alimentation, il faut évidemment apprendre à consommer mieux, mais aussi à consommer différemment. Et si la réduction drastique de notre consommation de viande semble évidente, c’est alors vers de nouvelles sources d’aliments – en particulier de sources de protéines – qu’il faut désormais se trouver.
Les nouvelles protéines sont-elles l’alimentation de demain ?
Les nouvelles protéines sont un axe de réflexion à privilégier, et à priori une solution incontournable, pour réduire notre consommation de viande tout en conservant un régime alimentaire équilibré.
Elles comprennent tout d’abord les légumineuses – lentilles ou pois chiches par exemple – qui sont très plébiscitées par les végétariens et végétaliens. Ces cultures demandant moins d’espaces et moins d’apports en eau que l’élevage animal, elles sont l’une des sources de protéines les plus connues pour se substituer à la viande.
Mais pour aller plus loin, il faut aussi s’intéresser à d’autres sources comme les insectes et les microalgues. À l’instar des légumineuses, ce sont des sources de protéines qui consomment peu d’eau, d’espaces ou encore qui n’ont pas besoins d’intrants chimiques. En plus d’avoir un impact environnemental réduit, ces nouvelles sources de protéines permettraient de résoudre un problème humanitaire : répondre aux besoins d’alimentation d’une population mondiale en constante croissance démographique.
En France, de nombreux acteurs se sont positionnés sur ces sujets, à commencer par Ynsect, qui devrait devenir rapidement l’un des leaders mondiaux sur ce marché. Reste désormais à ce que le législateur facilite la mise sur le marché de ces produits