En 2018, Charlotte Alaux, qui se déplace en fauteuil roulant depuis son plus jeune âge, s’est associée à quatre ingénieurs de l’École des Ponts ParisTech et de l’université de Stanford : Robin Lhommeau, Sulivan Richard, Mathieu Izaute et Noé Vinot-Kahn. Ensemble ils ont créé Omni, une startup qui conçoit une fixation permettant de lier une trottinette électrique à un fauteuil roulant.
« Les trajets me prennent deux fois plus de temps qu’à une personne valide, à cause des obstacles sur le chemin : des côtes, des pavés, des transports en commun peu accessibles » raconte Charlotte Alaux, qui ajoute « parcourir manuellement plus de 800 mètres, c’est fatiguant. » La solution proposée par Omni a donc pour but d’améliorer considérablement la mobilité des plus de 1,4 millions de personnes qui se déplacent en fauteuil roulant en France.
Une solution inclusive qui donne autonomie et liberté aux personnes en fauteuil
Utiliser la même trottinette que les personnes valides renforce aussi l’inclusion des personnes en fauteuil au sein de notre société. « C’est chouette de partager la même solution de mobilité que sa famille, ses amis. Et d’aller dans n’importe quel commerce pour acheter sa trottinette et pas dans un magasin para-médical. »
La trottinette électrique, qui motorise le fauteuil, permet ainsi de passer les obstacles et de gagner en autonomie et en liberté. Les cinq co-fondateurs ont fabriqué une fixation qui fait le lien entre la trottinette et le fauteuil roulant. Plusieurs brevets ont été déposés pour cette innovation qui s’adapte à un maximum de fauteuils et de trottinettes. En complément, Omni est actuellement en discussion avec les opérateurs des flottes de trottinettes en libre service pour pouvoir y adapter plus facilement la fixation.
« Et en plus, comme c’est un produit grand public, les prix sont beaucoup plus bas que la motorisation habituelle d’un fauteuil. » En effet, pour celui ou celle qui achète la trottinette et la fixation, le budget est d’environ 1 300 euros, soit quatre fois moins cher que les solutions disponibles par ailleurs. Une manière de lever un autre frein qui concerne les personnes en fauteuil roulant.
Permettre de motoriser un fauteuil à un coût abordable
En effet, le coût très élevé des solutions de motorisation actuellement proposées sur le marché n’est pas abordable pour tout le monde, principalement « parce qu’elles sont développées spécifiquement pour des personnes en fauteuil roulant, donc pour un petit marché« » précise Charlotte Alaux. Son fauteuil manuel coûte 5 000 euros, et il faut compter 5 000 de plus pour y installer une assistance électrique.
La motorisation est différente de l’achat d’un fauteuil électrique, qui sont aussi très chers à l’heure actuelle, sans toujours répondre aux attentes des personnes en fauteuil manuel. « Tout comme une personne valide veut continuer à utiliser ses jambes et une assistance électrique sur son vélo pour faire de la moyenne distance, au quotidien on préfère utiliser nos bras » ajoute l’entrepreneure.
Le coût d’équipement d’un fauteuil manuel peut être un obstacle pour des foyers qui sont souvent plus précaires que l’ensemble de la population française. Le handicap est en effet reconnu, études à l’appui, comme un facteur d’exclusion du travail et de diminution des ressources des aidants comme des personnes handicapées. L’idée des cofondateurs pour réduire les coûts et faciliter la motorisation de fauteuils a donc été d’adapter du matériel destiné au grand public, et sortir du secteur du handicap, pour atteindre plus vite des
économies d’échelle.
Nos acheteurs ont entre 12 et 67 ans et sont plutôt des urbains, mais pas uniquement
Une phase de crowdfunding en cours
Omni fait partie des Future 40, les 40 startups les plus prometteuses hébergées en 2020 à Station F. Également accompagné par l’École des Arts et Métiers et par 50Partners Impact, elle a lancé début décembre 2020 une campagne de crowdfunding sur KissKissBankBank pour développer ses premières ventes. La première série de cent fixations sera livrée en mars, et les autres en juin 2021.
Dans la logique inclusive du projet, l’assemblage du Globe Trotter est réalisé dans un ESAT. Par ailleurs, un partenariat avec plusieurs constructeurs permettra de commercialiser début 2021 des trottinettes d’un usage plus confortable en fauteuil que celles du commerce, dont le guidon ne se rapproche pas.
Depuis la fondation d’Omni, l’équipe a plus que doublé et emploie aujourd’hui onze personnes à temps plein, essentiellement des profils d’ingénieurs et de commerciaux. D’ici un an, une fois le marché français atteint, Omni souhaite poursuivre son développement à l’international. En parallèle, la startup a engagé un combat pour que les aides publiques qui soutiennent l’usage des vélos à assistance électrique soient également accessibles aux personnes qui veulent motoriser leur fauteuil, « pour qu’on soit dans l’inclusion de bout en bout, en termes de solution technique et de subventions », conclut Charlotte Alaux.