18 Février 1876. Louis Mekarski présente son procédé de moteur à air comprimé aux membres de la Commission Officielle chargée par le Ministre des Travaux Publics d’examiner les différentes solutions proposées pour la traction mécanique des tramways dans les villes.
En cette seconde moitié du 19ème siècle, l’industrialisation des sociétés européennes sonne en effet le glas du transport hippomobile. Les chevaux ne frapperont plus les pavés de leurs sabots, l’heure est à la mécanisation, et déjà se posent des questions sur les possibles nuisances et dangers de ces nouveaux modes de déplacement.
Alors que l’électrique s’imposera comme le mode de propulsion privilégié pour les transports en commun au début du vingtième siècle, il y eut cependant une courte période de notre histoire durant laquelle les tramways Mekarski, fonctionnant grâce à de l’air et de l’eau, ont préfiguré un véritable modèle de transports propres.
Un tramway « écolo » qui ne résistera pas à l’électrique
Né en 1843 en Auvergne, Louis Mékarski est le fils du Comte Jean Népomucène Mékarski, lui-même cousin du roi Stanislas de Pologne. Après l’échec sanglant de l’Insurrection Polonaise de 1830-1831 contre la domination Impériale Russe, ce sont plus de 10 000 Polonais qui trouvent refuge en France.
Le Comte Mékarski s’établit à Clermont-Ferrand où il fonde une famille composée de trois enfants. Jean Mékarski se rallie aux idées Philosophiques de Claude-Henri de Rouvroy de Saint Simon qui prônait « la foi menant au progrès, la confiance dans le machinisme, la certitude que c’est dans une industrie morale que réside la condition du bonheur, de la liberté et de l’émancipation ». Ainsi, Louis mais aussi son jeune frère Jules et surtout sa sœur Pauline – dite Paule Minck, journaliste et communarde – sont imprégnés d’idéaux très novateurs qui ont marqué la deuxième moitié du 19ème en France.
Ne déverser dans l’atmosphère ni fumée, ni flammèches, ni panache de vapeur ; fonctionner avec peu ou pas de bruit ; ne présenter aucun danger ni pour les voyageurs eux-mêmes ni pour les riverains
Louis Mekarski
Il fonde aux alentours de 1873 la Société des Moteurs à Air Comprimé et obtient, 3 ans plus tard, une première concession pour installer ses tramways à Nantes. Il deviendra à l’occasion Directeur Technique de la Compagnie des Tramways Nantais. Les trams à air comprimé de Louis Mekarski permettront aux nantais de se déplacer jusqu’en 1913.
En parallèle, son procédé équipera également de nombreux tramways en région parisienne, à Paris, à Nogent, Versailles, Saint-Maur ou encore Saint-Quentin. Les tramways Mekarski équiperont également Aix-les-Bains ou encore La Rochelle, ville pionnière en matière de mobilités durables, qui sera la dernière à abandonner les trams Mekarski en 1929.
Un retour de l’air comprimé 100 ans plus tard ?
90 ans plus tard, le 22 juin 2019, le fabricant français MDI présentait un véhicule à air comprimé fabriqué en partenariat avec Véolia, baptisé l’Air’volution. Reprenant le procédé inventé par Louis Mekarski, l’Air’volution est une benne à ordure propulsée grâce à un moteur à air comprimé. Elle n’émet aucune pollution atmosphérique et presque aucune pollution sonore. Dans la foulée, la firme MDI a présenté l’Airpod 2.0, un petit véhicule citadin à air comprimé.
Alors que les regards se tournent majoritairement vers l’hydrogène ou l’électrique pour décarboner nos moyens de transports, l’air comprimé représente également une alternative crédible pour certains véhicules. L’invention de Louis Mekarski pourrait donc avoir une nouvelle chance de briller dans les années à venir.