La livraison par drone pourrait avoir tout d’une bonne idée pour la transition écologique, notamment dans l’optique de décarboner le secteur des transports. En effet, le marché de la livraison de colis a explosé en France et dans le monde ces dernières années, et en particulier pendant la crise sanitaire. En France, on estime qu’un milliard de colis a été distribué en 2020, ce qui représente pas moins de 137 000 tonnes d’emballages plastiques et cartons, selon les chiffres de La Poste.
Avec l’essor du e-commerce et du quick commerce, l’engouement des consommateurs pour les plateformes de livraison provoque ainsi un rebond très important du transport en ville, en particulier sur le fameux « dernier kilomètre », celui qui est le plus difficile à optimiser. À Paris, par exemple, le transport de marchandises ne représente que 15 à 20 % du trafic automobile, mais génère pourtant 45 % des particules fines émises. Néanmoins, difficile d’imaginer, des armées de drones parcourir nos centres-villes en permanence. D’un point de vue environnemental, pas sûr que leur conception soit très pertinente. D’autres freins côté sécurité et nuisances sont également en jeu.
Il existe évidemment des solutions pour éviter que cet explosion de livraisons ne soit accompagnée d’une explosion d’émissions de CO2 : les scooters électriques, les vélos ou vélos-cargos en font partie. Un vélo cargo triporteur possédant une caisse de 1 500 litres émet, par exemple, 85 % de CO2 en moins qu’un véhicule thermique de la même capacité. Mais ces options, si elles sont efficaces pour la livraison en centre-ville de métropoles, sont aussi limitées pour les zones isolées ou difficiles d’accès. Et sur ce sujet, la livraison par drones pourrait être une solution intéressante.
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La livraison par drone, un bon point pour les zones isolées et difficiles d’accès
En Septembre 2020, l’ADEME a publié une étude sur la livraison de colis de 2kg et moins par drone dans des sites isolés, et son impact écologique, dans le cadre du projet SHERPA. Ce dernier s’intéresse aux zones rurales isolées puisqu’elles induisent une consommation importante de carburant, une usure prématurée des véhicules et surtout, une pénibilité du travail pour les livreurs.
D’après l’étude, plus la distance est importante, plus la livraison par drone permet d’éviter des émissions de CO2. Les conclusions de l’étude incitent à continuer les expérimentations, notamment en augmentant la distance et la masse et volume des colis transportés.
En décembre 2016, une ligne de livraison par drone sur un site difficile d’accès a d’ailleurs été ouverte en France entre Saint Maximin la Sainte Baume et Pourrières, dans le Var. C’est le groupe DPD qui s’est chargé de la logistique. En 2019, elle en a ouvert une seconde en Isère, via une plateforme mobile installée directement sur le camion des livreurs. Ici, l’objectif était de proposer une alternative aux livreurs pour rejoindre une commune difficile d’accès car en zone montagneuse. Le drone leur permet ainsi d’éviter un écart d’une vingtaine de kilomètres à travers des routes de montagne pour rejoindre la commune de Mont-Saint-Martin. À la place, il effectue le trajet sur 3 kilomètres en 8 minutes aller-retour. Un gain de temps intéressant pour atteindre des lieux particulièrement isolés et difficiles d’accès, mais qui peine à se déployer hors de ces cas précis.
Car, si de nombreux transporteurs ont investi le marché, ils ne sont pas nombreux à proposer des solutions viables. Google a été le pionnier avec son service Wing. Ce dernier a été testé et développé à Logan, une localité australienne appelée officieusement la “capitale mondiale de la livraison par drone”. Cependant, le projet n’a pas encore décollé. Le géant de l’e-commerce Amazon a lui aussi lancé son service de livraison par drone, appelé Prime Air, en 2016, mais celui-ci n’est toujours pas opérationnel.
Des freins à lever avant toute chose
Outre les risques de perte des colis en vol et les risques de collisions, la livraison par drone doit encore affronter certaines difficultés. Se pose notamment la question du poids des colis que ces engins sont capables de transporter. Pour l’instant, le service de Google limite les livraisons aux colis d’1,3 kg et dans un rayon de 20km autour du centre de déploiement. Mais qu’en est-il des colis plus importants ?
Par ailleurs, des questions de sécurité sont également posées, en particulier les nuisances sonores et les nuisances vis-à-vis de la faune. Se pose aussi la question des infrastructures permettant leur décollage et la réception des colis. De nombreuses raisons pour lesquelles la livraison par drone a peu de chances de se développer réellement dans les zones urbaines à court ou moyen terme. En outre, d’un point de vue environnemental, il ne faut pas oublier que la conception des drones et de leur batterie consomme des ressources qui pourraient être mieux utilisées. Ici encore, l’utilisation des vélos et vélos-cargos pour les livraisons en ville, ou de solutions de mutualisation comme celles proposées par des startups comme Cocolis semblent plus intéressantes.
En revanche, pour les livraisons en zones isolées, la livraison par drone est une alternative plutôt efficace et positive pour l’environnement, les livreurs et les clients. D’autres alternatives sont également à l’étude. En Gironde, on peut notamment retrouver une startup étonnante – Flying Whales – qui conçoit un ballon dirigeable pour permettre de livrer les zones insulaires et difficiles d’accès.