Tout est parti d’une initiative lancée en 2010 par le designer néerlandais Bas van Abel, sous la forme d’une campagne de sensibilisation aux minerais de conflit qui équipent nos appareils numériques. Des minéraux (étain, tantale, tungstène et or) qui sont extraits dans des conditions violant les droits humains, dans des zones de conflit, et dont les profits servent à alimenter des groupes armés.

3 ans plus tard, ce mouvement de sensibilisation est devenu une entreprise afin de prouver qu’il est possible de proposer un smartphone durable et équitable au travers de l’approvisionnement responsable en matériaux, en incorporant des matériaux recyclés et via un design qui facilite la réparabilité de l’appareil. En 2021, Fairphone a vendu 88 000 exemplaires de ses téléphones dans le monde, principalement en Allemagne et en France, et réalisé un chiffre d’affaires autour de 40 millions d’euros. Une goutte d’eau sur un marché dominé par les géants Apple, Google et Samsung, mais un phénomène dans le monde de la tech for good et une source d’inspiration pour de nombreuses startups engagées dans le numérique responsable.

Aujourd’hui, le phénomène Fairphone écrit une nouvelle page de son histoire en officialisant une levée de fonds de 49M€ qui devrait lui permettre d’accélérer sa croissance et de renforcer son impact tout en poursuivant sa mission principale : rendre l’électronique plus éthique.


Sensibiliser à l’équité et à la durabilité dans l’industrie électronique

Cette levée de fonds a été réalisée auprès d’un consortium international d’investisseurs à impact, mené par Invest-NL, le fonds ABN AMRO Sustainable Impact, Quadia et les investisseurs historiques de la marque, DALHAP, DOEN Participaties et PDENH. Une opération financière qui doit permettre au fabricant de smartphones responsables de renforcer son positionnement, d’investir dans le développement de ses produits et l’amélioration de son service clientèle, mais aussi d’accélérer l’intégration de matériaux équitables et recyclés dans l’ensemble du portefeuille de produits de la marque.

« Parti d’un mouvement social, Fairphone est aujourd’hui une entreprise à impact reconnue. Je tiens à remercier tous les actionnaires qui nous ont soutenus au fil des ans. Avec un socle étendu d’investisseurs alignés sur notre mission, nous allons renforcer la sensibilisation à une électronique plus juste et accélérer la croissance de notre entreprise et de notre impact » commente Eva Gouwens, PDG de l’entreprise néerlandaise.

Cette levée de fonds permettra également à la marque de sensibiliser davantage le grand public et le secteur à l’équité et à la durabilité dans l’industrie électronique, l’une des missions principales de cette startup certifiée B Corp. « La mission de Fairphone, ça n’est pas uniquement de faire un téléphone équitable, c’est de changer l’industrie du téléphone, en particulier sur ce qui touche à l’exploitation des minerais » nous expliquait ainsi récemment Agnès Crepet, ingénieure française et « Head of Software Longevity & IT » au sein de l’entreprise.


L’électronique éthique pas incompatible avec un modèle économique rentable ?

En moyenne, on estime qu’il se vend 1,4 milliard de smartphones dans le monde chaque année, avec un taux de renouvellement de ces appareils qui est en moyenne de 32 mois selon une étude de l’Arcep. Un sujet environnemental qui n’est pas anodin car le secteur du numérique est à l’origine d’environ 4% des émissions mondiales de gaz à effet de serre aujourd’hui. Des émissions de gaz à effet de serre devraient s’élever à 2,3 milliards de tonnes de CO2 équivalent d’ici 2025.

En créant un marché pour l’électronique éthique, Fairphone incite ainsi l’ensemble de l’industrie électronique à agir de manière plus responsable et, à chaque téléphone vendu, l’entreprise démontre qu’il y a une demande pour de l’électronique éthique et que ce n’est peut-être pas incompatible avec un modèle économique rentable. L’entreprise s’engage ainsi pour motiver les fournisseurs et les fabricants à continuer à investir dans l’amélioration des conditions de travail, la satisfaction des travailleurs et les pratiques commerciales durables, ainsi qu’à offrir de meilleures opportunités aux communautés impactées par sa chaîne d’approvisionnement.

Récemment, c’est la startup Qarnot qui a annoncé une levée de fonds conséquente de 35M€ pour industrialiser la commercialisation de ses data centers écoresponsables. Une preuve que le numérique et l’environnement ne sont pas incompatibles mais surtout que les investisseurs suivent de près ces entreprises afin de les aider à franchir un cap.

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