La vigne est une culture emblématique en France. Avec 750 000 hectares, nous possédons 11 % de la surface mondiale de vignes de cuve. En 2019, nos 85 000 exploitations vitivinicoles ont produit 4,2 milliards de litres de vin, soit 17 % de la production mondiale. La filière représente ainsi 500 000 emplois directs et indirects et un chiffre d’affaires, en 2019, de 13 milliards d’euros.

Mais derrière ces beaux chiffres, il y a une inquiétude croissante qui pèse sur le secteur vinicole français en raison du réchauffement climatique. Car la vigne est une culture sensible aux évènements météorologiques. En 2021, deux nuits de gel entre le 6 et le 8 avril 2021 ont entraîné une perte de production de vin d’environ 30% par rapport à 2020 pour la filière française.

Cette année, le gel a été moins dur, mais la sécheresse persistante depuis le début de l’année, la canicule puis les orages de grêle du mois de juin entraînent aussi des pertes dans les vignobles qui devraient affecter la récolte 2022. Sans compter le fait que la chaleur a déjà des conséquences observables : des récoltes précoces et une augmentation du taux de sucre dans les vins. Par exemple, en Bourgogne, les dates de vendange à Beaune ont avancé de 20 à 25 jours en seulement 50 ans.

graphique, dates de vendanges à Beaune entre 1920 et 2020
Date des vendanges à Beaune, entre 1920 et 2020


En France, c’est le projet Laccave, qui fédère les professionnels du vin mais aussi les chercheurs de l’INRAE et du CNRS, qui étudie les potentielles solutions à mettre en place pour permettre à la vigne de s’adapter au réchauffement climatique : taille différente de la vigne, déplacement des parcelles vers le Nord, sélection de cépages plus résistants ou création de nouvelles variétés, mise en œuvre de pratiques agroécologiques et utilisation de l’agriculture de précision sont, entre autres, les solutions préconisées.

Sur ce dernier créneau, les nouvelles technologies permettent aujourd’hui de faciliter l’adaptation des exploitations agricoles aux évènements climatiques. C’est notamment ce que propose la startup Deep Planet, qui permet aux viticulteurs, grâce aux images satellites, d’obtenir une connaissance plus fine de leurs exploitations. Une tendance dans laquelle s’inscrivent plusieurs startups françaises, à l’image de ce que proposent Kermap et TerraNIS.

Lire aussi : Bliss Ecospray limite la dérive de produits phytosanitaires utilisés pour les vignes


Anticiper le risque environnemental grâce aux satellites

Ils se sont rencontrés à l’université d’Oxford, en Angleterre. Après s’être chacun orienté dans des secteurs différents, Natalia Efremova, Sushma Shankar et David Carter se sont retrouvés et ont mis en commun leurs expertises respectives : Deep Planet était né autour d’une certitude : l’étude approfondie des terres par l’utilisation des images satellitaires permettra d’agir plus efficacement pour protéger le secteur agricole. « Il y a eu une explosion récemment dans le nombre de données rendues accessibles, mais peu de personnes arrivent à les comprendre« , explique Sushma Shankar, une des co-fondatrices de la startup.

C’est en particulier autour de la filière viticole que Deep Planet a débuté ses travaux. Elle collecte ainsi des données au sol, qui sont mises en relation avec les images transmises notamment par les satellites de l’Agence Spatiale Européenne. Ces données sont ensuite analysées et traitées par la startup, qui les met ensuite à disposition de ses clients sur une plateforme personnalisée. Pour les exploitants, ces données permettent d’obtenir une vision très fine des vignes et, surtout, de prédire leur évolution grâce à des modèles prédictifs.

Avec cette technologie, baptisée VineSignal, l’outil permet de prédire la date à laquelle les vignes arrivent à maturité pour pouvoir être récoltées au meilleur moment. Chaque pied de vigne est ainsi suivi individuellement et son bon état général est évalué selon plusieurs critères (humidité des feuilles et au sol, présence de nuisibles etc.). L’application permet ainsi de conseiller les exploitants sur les traitements à effectuer. Par exemple, l’irrigation peut ainsi être optimisée en proposant des fréquences et des quantités d’eau en fonction des relevés de données effectués.

« Deep Planet, ce sont plus de deux cents utilisateurs de la plateforme et plus de soixante clients, parmi lesquels Bernard Magrez, Château Haut-Bailly et Pernod Ricard, répartis principalement entre la France, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et les Etats-Unis » ajoute Sushma Shankar, dont l’objectif, à terme, sera d’élargir son modèle à d’autres cultures. L’entreprise réalise d’ailleurs actuellement des essais sur des parcelles de pommes de terre.

À lire également