Les biodéchets représentent une part très importante de nos déchets : au moins 30% du volume des poubelles françaises. Et dans ce volume, une large part des restes alimentaires provient d’un gaspillage de ressources, ce qui ne fait qu’aggraver nos émissions de CO2. D’après le Giec, 10% des émissions de GES sont liées au gaspillage alimentaire. Cependant, il existe évidemment de nombreuses pratiques et entreprises qui permettent de lutter contre le gaspillage.

Et il existe aussi différentes solutions qui permettent de faire de nos biodéchets, non plus un problème à gérer, mais un atout économique, social et environnemental. C’est notamment le cas du compostage. Une pratique qui devrait se normaliser dans les années à venir au vu de la réglementation qui va imposer aux ménages un tri à la source de leurs biodéchets. Un créneau sur lequel se positionne l’entreprise française UpCycle, une SAS à statut ESUS (Entreprise Solidaire d’Utilité Sociale).

De la culture de champignons à la valorisation des biodéchets

L’entreprise a été fondée en 2011 par Cédric Péchard, un passionné de biomimétisme qui travaille d’abord sur un procédé permettant de produire des champignons en valorisant les biodéchets. En 2014, il s’associe avec Arnaud Ulrich et Grégoire Bleu et, deux ans plus tard, en 2016, les trois associés opèrent un pivot dans leur activité en proposant des composteurs électromécaniques. Le but est d’abord interne, pour mieux valoriser les déchets de la startup.

Mais en 2020, après quatre années de développement, UpCycle se lance dans la conception et la fabrication de son propre matériel (auparavant produit par TinyPlanet, une entreprise anglaise). Lors de cette même année, elle lève 2,2M€ auprès d’industriels issus du monde agricole (La Florenaise, AMP-Aquaponie, SCAEL) et de la torréfaction (Cafés Richard). Le fond impact AVIVA Impact Investing France ainsi que les pouvoirs publics, dans le cadre de France Relance (avec le soutien financier de la région Ile-de-France et de la BPI), répondent également présents.

Fin 2020 l’entreprise sort donc son produit phare, baptisé Démeterra. Il s’agit en fait d’une gamme complète de produits autour du compostage, qui doit permettre d’assurer l’intégralité du processus de transformation des déchets. Elle comprend ainsi des produits allant du sac kraft pour stocker les biodéchets à la palette de récupération et de maturation du compost, en passant par les broyeurs et les composteurs, produits vedettes de l’entreprise.

Point non négligeable de la démarche, la société, soucieuse de son impact et attachée à son statut d’entreprise à mission, a réussi le pari industriel du 100% fabriqué en France ce qui permet à UpCycle de labelliser ses produits Origine France Garantie. 

Les cofondateurs d'Upcycle avec Richard Ferrand et des élus aveyronnais
Les co-fondateurs d’UpCycle en compagnie de R. Ferrand lors de l’inauguration de leur nouvelle usine


L’économie circulaire au coeur du projet

Qu’il s’agisse de site de compost en collectivité territoriale ou en entreprise, la démarche de la société permet de rapprocher le lieu de compostage du lieu de source d’émission des déchets et donc de repenser le mode de transport de ces détritus. Ces derniers sont acheminés d’un point à un autre de la chaîne en vélo, ce qui diminue fortement les coûts économiques et environnementaux générés par le transport des déchets en temps normal. Ainsi UpCycle propose une activité qu’elle estime 10% à 50% moins coûteuse que les alternatives traditionnelles.

Un atout majeur du projet de la startup tient aussi à sa capacité à orienter les collectivités vers les principes de ville durable et d’urbanisme circulaire. Les fermes urbaines faisant très souvent partie de la boucle imaginée par l’entreprise. À Rennes, où un quartier de la ville a fait confiance à UpCycle, le compost produit avec les biodéchets des habitants permet par exemple d’alimenter une ferme urbaine proche du site de compostage. Le but, à l’avenir, est de livrer les produits de la ferme au restaurant scolaire du quartier.

La circularité peut se réfléchir à plein d’échelles, cela peut concerner un immeuble, un quartier, une entreprise.

Maëlle Joulin, directrice marketing-communication d’UpCycle


Une innovation qui booste la competitivité de l’entreprise

Le processus de compostage proposé par UpCycle est très compétitif puisque le compost obtenu est utilisable au bout de 10 semaines, alors qu’il faut attendre parfois 6 mois à un an dans d’autres cas. Les composteurs de l’entreprise transforment les biodéchets en compost en une quinzaine de jours, le tout sans nuisances olfactives. Un procédé qui rappelle ce que proposent d’autres startups de l’économie circulaire, à l’image des Alchimistes, présents dans plusieurs villes françaises, où de la startup Les Détritivores, basée à Bordeaux.

Une fois broyée et transformée, la matière obtenue par UpCycle est certifiée comme étant du compost par la norme NF 44 051. UpCycle conseille de laisser maturer ce résultat 8 semaines dans des bacs aérés puis de l’utiliser comme un amendement classique. Il peut aussi être utilisé pour l’agriculture biologique, précise la start-up. Cette méthode a permis de composter 400 tonnes de matière organique en 2020 et l’entreprise signale que, sans pandémie, ce chiffre aurait dû être deux fois plus élevé. Mais l’entreprise ne se contente pas de vendre ou de louer ses machines, elle conseille et accompagne aussi ses clients pour leur faciliter l’usage des produits.

Cela passe par une partie formation et conseil fournie par les équipes de l’entreprise. L’indépendance des clients est fortement facilitée par les logiciels intégrés aux composteurs, ces derniers permettent aux utilisateurs de mieux comprendre et d’optimiser le fonctionnement des machines. 

Les 2 cofondateurs d'upcycle
Grégoire Bleu et Arnaud Ulrich les co-fondateurs d’UpCycle


Une conjoncture propice au développement d’UpCycle

UpCycle compte aujourd’hui vingt employés et l’entreprise continue de se développer. En juillet, elle a inauguré avec son partenaire Fabtec, sur le site aveyronnais de Meyran, une nouvelle usine, destinée à augmenter sa capacité de fabrication de matériaux. L’entreprise est « en phase de conquête et de consolidation » selon la directrice marketing-communication Maëlle Joulin. 

La start-up compte maintenant se déployer à grande échelle. En 2020 elle a installé une quarantaine de machines, et en a ajouté 60 cette année. L’objectif est fixé à 100 de plus pour 2022. Basé administrativement à Versailles, UpCycle a, depuis sa création, ouvert des bureaux à Rennes, à Lyon, à Marseille et dans les DOM-TOM. Elle a aussi ouvert des bureaux au Benelux ainsi qu’en Suisse. De plus, dans le cadre du FASEP, des projets au Rwanda ainsi qu’au Maroc devraient voir le jour dans les mois à venir. 

UpCycle présentait un chiffre d’affaires d’1,2M€ en 2020, celui de 2021 devrait s’élever à 4,5M€ soit une multiplication par plus de 3 en un an, le tout en période de pandémie. Un chiffre qui devrait continuer à croître puisque le tri des biodéchets deviendra obligatoire pour tous en 2024, conformément à la directive européenne relative au tri à la source des biodéchets.

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