Selon l’association Gestes propres, se sont plus de 520 000 tonnes de déchets qui ont été retrouvés aux abords des routes, des cours d’eau et des espaces naturels en 2018 en France. Ainsi, d’après Stop Décharges Sauvages, il y aurait environ 600 territoires en France qui seraient sujets à ces dépôts non-autorisés aujourd’hui.

Même si la priorité est à l’amélioration des techniques de tri et de collecte pour éviter que ces déchets ne se retrouvent dans la nature, il n’en reste pas moins que des actions curatives sont essentielles pour ceux qui ont échappé à ce traitement et se retrouvent abandonnés dans la nature.

En effet, les décharges sauvages nuisent à notre environnement en venant polluer l’air ainsi que l’eau lorsque les pluies entrainent avec elles les substances toxiques contenues dans les déchets. De plus, la fermentation des déchets produit du méthane qui, par son effet de serre très puissant, contribue au réchauffement climatique. Enfin, en cas d’incendies, les décharges sauvages libèrent aussi des gaz toxiques dangereux pour la santé.


Des applications pour mobiliser les citoyens au nettoyage des décharges sauvages

Afin d’engager les citoyens dans la préservation de leur environnement et de leur cadre de vie, de nombreuses applications ont vu le jour comme Clean2gether en 2019. Sur cette application, les utilisateurs peuvent signaler les déchets abandonnés en pleine nature ou en bord de route, afin de faciliter l’organisation des opérations de nettoyage en y impliquant associations, régions et citoyens et en informant les collectivités.

Plus récemment, un jeune entrepreneur de 16 ans a aussi lancé son application GreenR sur le même principe que Clean2gether. En quelques mois, déjà 16 000 utilisateurs présents dans 30 pays différents se sont impliqués dans le nettoyage des déchets sauvages par l’organisation de « greenwalks », des opérations de ramassage des déchets en groupe. À l’heure actuelle, 1 100 spots de déchets ont déjà été déclarés via l’application et nettoyés grâce aux utilisateurs.

Ces applications s’ajoutent à plusieurs appli similaires comme TrashOut ou encore Sentinelles de la nature, une application de France Nature Environnement qui invite les utilisateurs à signaler des atteintes à la nature ou des initiatives favorables à l’environnement pour ensuite en informer les référents associatifs de la région.

D’autres application plus locales peuvent aussi être citées comme Dansmarue pour les déchets sauvages des rues et parcs parisiens ou plus sportives comme Run Eco Team qui propose de ramasser des déchets tout en courant.

Une problématique coûteuse pour les collectivités territoriales

Selon une étude de l’Ademe réalisée en 2019, la première difficulté à laquelle font face les collectivités territoriales pour faire face à ce problème est la quantification des déchets sauvages. En effet, 87% des collectivités interrogées n’ont pas de données chiffrées sur le sujet. Seules 4% disposent de données mesurées et 9% de données estimées. Difficile donc de cerner la problématique pour ensuite prendre des mesures efficaces pour y répondre.

Selon l’Ademe, chaque français pourrait être responsable de 21,4 kg de déchets sauvages par an, mais ce ratio reste difficilement extrapolable à l’échelle nationale étant donné la faiblesse de l’échantillon et la diversité de la problématique sur le territoire national.

À cela s’ajoute la difficulté d’identifier les pollueurs pour ensuite pouvoir les sanctionner. D’autant plus que dans certains cas, ce sont des réseaux mafieux qui sont à l’origine de ces décharges. En juin dernier, un réseau de déversement illicite de déchets de chantier a, par exemple, été démantelé par la police sur la Côte d’Azur.

Pour améliorer cette identification, des techniques existent néanmoins mais requièrent des ressources humaines et technologiques souvent coûteuses pour les collectivités. L’ONF a par exemple mis en place dans la forêt de Fontainebleau de toutes petites caméras perchées dans les arbres afin d’identifier les auteurs de dépôts sauvages.

Enfin, une fois les déchets jetés dans la nature, les différents acteurs ont tendance à se renvoyer la balle pour les retirer. Que ce soit pour les collectivités locales, l’Office National des Forêts ou encore les sociétés d’autoroute, ces dépôts sauvages ont un coût important qui est généralement supporté, in fine, par le contribuable.

Sur ce point, le rapport de l’Ademe insiste sur la nécessité d’une approche multi-acteurs afin que les moyens mis en place par une collectivité pour lutter contre les déchets sauvages ne fassent pas que déplacer le problème vers une autre.

Le coût de ces déchets sauvages est compris entre 100 et 500 euros la tonne, parfois au-delà de 1 000 euros pour des produits dangereux comme l’amiante.

Jean-Christophe Pouet, chef du service mobilisation et valorisation des déchets de l’Ademe


La loi anti-gaspillage pour prévenir et sanctionner les décharges sauvages

Alors qu’il existe aujourd’hui en France une dizaine de filières à responsabilité élargie des producteurs (REP), la loi anti-gaspillage adoptée en 2020 prévoit d’en ajouter plusieurs pour améliorer la collecte notamment des jouets, des articles de sports, des produits du tabac mais aussi et surtout des produits ou matériaux de construction du bâtiment qui représentent la majeure partie des dépôts sauvages. Ces déchets pourront donc être repris gratuitement lorsqu’ils seront retourné à la filière REP concernée.

À l’avenir, la majorité du coût de nettoyage des dépôts sauvages sera également prise en charge par les filières REP, au prorata des déchets présents dans les dépôts. L’objectif est ainsi de soulager les collectivités et de transférer le coût du nettoyage des contribuables vers les filières.

Parmi les autres avancées, la loi renforce également les sanctions pour les rendre plus dissuasives. « Demain, lors d’un dépôt sauvage, les délinquants se verront infliger une amende immédiate de 1500€ : celle-ci a été multipliée par 10. Leur véhicule sera également immobilisé » déclarait sur le sujet Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique.

En ce qui concerne les petits dépôts sauvages, la contravention passera prochainement de 68€ à 135€. Et pour le cas des déchets professionnels, les sanctions peuvent déjà atteindre 75 000 euros d’amende et une peine de 2 ans de prison.

Le principe des filières REP est de donner à celui qui fabrique, qui distribue ou qui importe un produit, la responsabilité de la prise en charge de sa fin de vie. Le producteur et le distributeur doivent ainsi financer, organiser et mettre en place les solutions de collecte, de réutilisation ou de recyclage appropriées pour leurs produits.

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