À l’approche des élections régionales, qui auront lieu les 20 et 27 juin prochain, petit tour d’horizon de quelques grandes thématiques sur lesquels les régions ont un pouvoir d’action en matière de transition écologique. Ces dernières ont en effet un rôle majeur dans la coordination des actions des collectivités publiques, mais aussi dans le financement direct et indirect de multiples initiatives.
Les régions favorisent le développement de l’intermodalité et de la mobilité durable
Alors que 90% des Français résident à moins de 10km d’une gare, 55% de celles-ci ne sont pas ouvertes au transport des voyageurs. Et pour cause, rien qu’entre 2017 et 2018, la SNCF a réduit de 37% ses liaisons intercités pour des questions de rentabilité. Pourtant, en tant que mobilité bas-carbone, le ferroviaire à un rôle primordial à jouer dans notre transition écologique. Un rôle qui peut donc être soutenu par les Régions.
En effet, ce sont elles qui s’occupent de la gestion des TER et des gares rattachées. Elles opèrent donc le maintien des petites lignes, mais aussi leur (re)développement. Elles participent également au renouvellement des flottes de train. Par exemple, les régions Bourgogne-Franche-Comté, Grand Est, Auvergne Rhône-Alpes et Occitanie ont très récemment passé commande à Alstom pour des TER à hydrogène.
De plus, à travers le SRADDET, les Régions fixent des objectifs en termes d’intermodalité, de développement des véloroutes et des voies vertes. Elles peuvent ainsi contribuer à l’essor d’une mobilité bas-carbone en augmentant par exemple le nombre d’emplacements vélo dans les TER ou de stationnements sécurisés dans les gares afin de faire de ces dernières des pôles multimodaux. Elles peuvent également favoriser le développement d’aires de covoiturage et attribuent aussi des subventions aux aéroports.
Elles soutiennent une alimentation et une agriculture durable
En ce qui concerne l’alimentation et l’agriculture, les Régions disposent aussi d’importants leviers pour changer en profondeur le modèle agricole et alimentaire. À partir de 2023, elles géreront notamment une partie des aides du second pilier de la Politique Agricole Commune (PAC) qui a pour objectif de soutenir les zones rurales.
Cela permettra aux autorités régionales, nationales et locales de formuler leurs propres programmes pluriannuels de développement rural à partir d’un «menu de mesures» européen et de co-financer ces programmes par des fonds de l’Union et des fonds régionaux ou nationaux. Il s’agit donc d’un levier fort pour la transition écologique de nos territoires si les Régions décident de cibler en priorité des pratiques vertueuses pour l’environnement telles que les pratiques agroécologiques.
En outre, les Régions, en complément des aides financières aux exploitations agricoles, elles peuvent valoriser la production et la consommation de produits durables grâce à la création de centrales d’achat, de plateformes d’approvisionnement, au soutien aux marchés, à la mise en relation des différents acteurs des filières durables, etc.
Enfin, via le SRADDET et le PRAD (plan régional de l’agriculture durable), les Régions peuvent encourager et participer à l’élaboration de Projets Alimentaires Territoriaux (PAT) tournés vers des projets solidaires et durables. Les projets alimentaires territoriaux ont pour objectif de relocaliser l’agriculture et l’alimentation dans les territoires en soutenant l’installation d’agriculteurs, les circuits courts ou les produits locaux dans les cantines. Ces projets sont élaborés de manière collective à l’initiative des acteurs d’un territoire (collectivités, entreprises agricoles et agroalimentaires, artisans, citoyens etc.).
Elles participent activement à la rénovation énergétique des bâtiments
En tant que cheffes de file de l’efficacité énergétique, les Régions ont la possibilité d’agir sur la rénovation en accompagnant les particuliers et les professionnels dans l’accès aux informations et aux acteurs, aux accompagnements techniques et aux moyens financiers alloués.
Pour cela, elles pilotent le Service public de la performance énergétique de l’habitat (SPPEH) sur leur territoire, dont l’objectif est de proposer un guichet personnalisé et unique d’information, de conseil et d’accompagnement pour que les particuliers et les petites entreprises puissent réaliser des travaux de rénovation.
Les Régions peuvent aussi soutenir la rénovation en orientant les subventions et investissements dont elles disposent via les financements européens et les contrats plan État-Régions (CPER). Il existe aussi des mécanismes financiers innovants comme le tiers-financement qui permet à une collectivité d’accompagner et de participer directement à des travaux de rénovation, le remboursement du prêt étant adossé aux économies d’énergie réalisées.
Au-delà de la rénovation, il s’agit aussi pour les Régions d’encourager la sobriété énergétique en accompagnant les habitants vers des modalités de production de chauffage et d’eau chaude plus respectueux de l’environnement (panneaux solaires thermiques, réseau de chaleur, géothermie…)
Elles permettent de développer des projets d’énergie citoyenne
À côté des objectifs de réduction de la consommation énergétique, le SRADDET fixe aussi des objectifs de production d’énergies renouvelables ou de valorisation des déchets par méthanisation et influencent ainsi les documents infrarégionaux qui encadrent le développement d’énergies renouvelables.
Les Régions peuvent accompagner l’émergence de projets d’énergie renouvelable dans les territoires, en particulier ceux portés par des acteurs locaux et citoyens, en apportant une aide technique mais aussi un soutien financier, via des subventions directes, une orientation des fonds européens, ou la création d’entreprises locales avec un objectif de production d’énergie. De plus, le patrimoine immobilier que possède chaque région peut également être mis à profit pour installer des panneaux photovoltaïques.
Les Régions ont donc un rôle essentiel à jouer pour encourager la transition les énergies renouvelables. D’autant plus qu’une production décentralisée d’énergies renouvelables pourrait créer 630 000 emplois locaux d’ici 2030 selon le CIRED, avec 2 à 3 fois plus de retombées économiques locales lorsque les projets d’énergie citoyenne sont privilégiés.
On appelle “citoyen” un projet de production d’énergie renouvelable qui ouvre majoritairement son capital au financement collectif et son pilotage aux acteurs locaux, dans l’intérêt du territoire et de ses habitants. Par ailleurs, l’implication des citoyens dans ces projets favorise l’appropriation territoriale en rendant les projets également plus pérennes sur le long terme.
Une production décentralisée d’énergies renouvelables pourrait créer 630 000 emplois locaux d’ici 2030 selon le CIRED
Elles favorisent la formation professionnelle et la reconversion des emplois vers les filières d’avenir
La transition écologique nécessite aussi des changements structurels en termes d’emplois et de production de biens. Il s’agit donc d’anticiper à la fois les secteurs qui perdront des emplois (notamment les secteurs de l’industrie fortement émetteurs de GES) et d’accompagner les secteurs de la transition qui nécessiteront demain de créer de nouveaux emplois.
Le but étant de pouvoir faire un diagnostic des secteurs menacés et des filières d’avenir dans la Région afin de construire et de subventionner des modules de reconversion et de formation professionnelle sur mesure pour accompagner la transition.
L’accompagnement vers les secteurs de la transition doit être vu comme une opportunité pour dynamiser les territoires, avec à la clé 1 million d’emplois non délocalisables selon WWF que ce soit dans les énergies renouvelables, la rénovation de bâtiments, l’agro-écologie ou encore la réparation.
En outre, les Régions sont en charge de définir et d’octroyer les aides aux entreprises (TPE et PME) de leur territoire. Par exemple, dans le cadre de la crise du coronavirus, elles se sont vues confier 16 milliards d’euros via le plan de relance national, somme qui peut notamment contribuer au développement d’entreprises à impact positif.
Elles ont un rôle pour préserver durablement les ressources naturelles et la biodiversité
En ce qui concerne les ressources, les Régions fixent les orientations stratégiques et les actions de chaque territoire en matière de préservation de la biodiversité et des ressources mais aussi de recyclage et de valorisation des déchets. En ce qui concerne l’eau, elles participent activement aux politiques de gestion de l’eau et des risques associés aux inondations. En ce sens, elles mettent en place une politique d’adaptation au changement climatique dont le financement peut passer par les fonds fonds européens distribués par les Régions.
Concrètement, si on prend l’exemple des forêts, les Régions peuvent contribuer à l’adaptation au dérèglement climatique ainsi qu’à la préservation de cette ressource en favorisant une exploitation durable de celles-ci qui permet d’avoir le moins d’impacts possibles sur la biodiversité et augmente la résilience des forêts. Cela peut aussi passer par la diversification des essences et le maintien de feuillus.
De plus, elles peuvent directement influencer les changements de pratiques par le biais de financements à des projets de sensibilisation et de prévention. En ce qui concerne les déchets par exemple, cette sensibilisation et prévention peut passer par une gestion exemplaire de ceux-ci dans les lycées et la restauration collective grâce à la définition d’un plan de réduction du gaspillage alimentaire ou par des pratiques d’éco-conception ou de réemploi.
Ainsi, il s’agit donc pour les Régions de préserver les ressources tout en anticipant leur fin de vie, le tout dans une logique d’économie circulaire (compostage, vente en vrac, réemploi, consigne…) Cela nécessite notamment de dédier des moyens humains à la formation des élus et des techniciens locaux et au développement de filière clés pour la réduction des déchets à l’échelle régionale (filière de traitement des biodéchets triés à la source, synergies avec le monde agricole par le biais de la méthanisation, filière de consigne pour réemploi…)
CC visuel d’entrée : Franck Dubray / MAXPPP