Essen est la neuvième plus grande ville allemande. Elle comporte environ 600 000 habitants. Située en Rhenanie du Nord-Westphalie, elle a été élue capitale européenne de la culture en 2010 puis capitale verte européenne en 2017. Deux distinctions majeures qui viennent illustrer la métamorphose réussie de cette ancienne cité minière en passe de devenir un exemple de ville durable. Grâce à une place importante accordée aux espaces verts, à un travail sur la qualité de l’eau et en s’appuyant sur son passé dans le domaine des énergies, la ville est désormais l’une des plus agréables à vivre en Allemagne.

« Essen a tiré de son passé industriel les leçons pour construire un avenir respectueux de l’environnement », déclarait Karmenu Vella, commissaire européen à l’environnement il y a deux ans. En effet, localisée dans le bassin industriel de la Ruhr, la ville revient de loin. Capitale de l’empire industriel de la famille Krupp, Essen fut l’un des principaux foyers du charbon et de l’acier en Europe au XXe siècle.

Avec un taux de chômage supérieur à la moyenne allemande, des mines de charbons et d’aciers qui ferment, elle a du prendre à bras le corps la notion de transition écologique afin de se donner une nouvelle dynamique. Une réussite qui tient également à une implication forte des citoyens et du secteur privé.

Zollverein
L’ancienne mine de charbon de Zollverein transformée en un grand parc


Les espaces verts, première étape d’une transition écologique réussie

Le titre de capitale verte européenne porte plutôt bien son nom. Les villes qui en bénéficient accordent généralement une place importante à la végétalisation de leur territoire, à l’instar de Vitoria-Gasteiz en Espagne. Avec 3 100 hectares de friches sur son territoire et environ 54 % de sa superficie considérée comme « espace vert », Essen ne déroge pas à la règle.

En terme d’urbanisme vert, une règle tacite semble d’ailleurs de mise dans l’ancienne cité minière. Elle veut que chacun des 600 000 habitants de la ville puissent se trouver à moins de 500 mètres d’un espace vert. Pour cela, la municipalité a notamment travaillée à réaménager le passé industriel de la ville afin de le transformer en zones écologiques.

L’exemple le plus parlant de cette transition, c’est la rénovation du complexe industriel de Zollverein. Ce complexe détient le titre de plus « belle mine du monde » et est inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco. Aujourd’hui, il a été entièrement reboisé. Les terrils servent de cadre à un jardin public ouvert à la promenade. Les voies de chemin de fer ont été réaménagées en pistes cyclables. Un tiers des treize hectares du site échappe au bitume. Des bassins alimentés par la récupération des eaux de pluie y ont été installés. De quoi ramener davantage de biodiversité mais aussi d’améliorer le cadre de vie et la qualité de l’air dans la ville.

Baldeneysee
Baldeneysee, le lac réouvert à la baignade après 40 ans d’interdiction en raison de la pollution


Raviver la biodiversité dans une ancienne zone industrielle

La création de bassins en ville grâce à la réutilisation de l’eau de pluie n’est pas le seul programme de gestion de l’eau que la ville d’Essen a mis en place. Elle a aussi travaillé sur de gigantesques chantiers liés aux rivières et lacs entourant la ville. C’est en réhabilitant ces zones fortement polluées par le charbon et l’acier – là où l’on pensait que la biodiversité était morte – qu’Essen prouve que rien n’est irréversible.

Le premier de ces chantiers a été la renaturation de l’Emscher. Cette rivière a longtemps été décrite comme une sorte d’égout géant à ciel ouvert. C’est au début des années 1990 qu’un programme pour la réhabiliter est engagé.

Un vaste projet estimé à 5,5 milliards d’euros, en partie financé par une taxe sur l’eau payée par les contribuables. En tout, ce sont près de 400 kilomètres de canaux souterrains qui ont été mis en place pour drainer et assainir ce cours d’eau qui traverse la ville au nord. En parallèle, c’est tout un « arc vert » le long de cette rivière qui a été crée en partenariat avec plus de 53 municipalités dans toute la région de la Ruhr afin d’y faire revenir la biodiversité.

L’autre projet symbolique illustrant la politique de gestion de l’eau de la ville d’Essen, c’est la réouverture à la baignade du lac du Baldeneysee. Il a fallut pour cela une politique d’aménagement et d’assainissement de l’eau. Mais le 21 mai 2017 après plus de quarante ans d’interdiction, les habitants de la ville d’Essen ont pu à nouveau s’y baigner. Ici, comme à Nimègue, ville hollandaise également capitale verte européenne, la gestion de l’eau s’inscrit comme un paradigme fort pour réussir la transition écologique des villes.

Essen ville verte


La transition écologique, vecteur pour l’emploi

Enfin, l’exemple de la ville d’Essen nous apprend que la transition écologique ne doit pas se faire au détriment du passé de la région mais, au contraire, en s’appuyant largement dessus. En Allemagne, l’Energiewende prévoit la fermeture de la vingtaine de réacteurs nucléaires du pays et d’atteindre 60 % de la production allemande en énergies renouvelables d’ici à 2050. A Essen, la dernière mine de charbon de la région a été fermée en 2018. Désormais, les énergies vertes sont au coeur de la politique de la ville.

Surnommée « capitale allemande de l’énergie », le territoire héberge en effet les sièges des plus grandes entreprises du secteur. RWE par exemple,spécialisée dans les énergies renouvelables, ou encore d’Ista, qui intervient dans le domaine des smart-grids. Cette dernière est notamment en charge d’un vaste programme de formation aux économies d’énergie dans les écoles de la ville. Ainsi, d’un ancien bastion des énergies fossiles, Essen vise maintenant à devenir une place forte des énergies renouvelables.

Cette politique de transition écologique vise aussi à dynamiser un marché de l’emploi en berne depuis la désindustrialisation de la région. Aux 13 000 postes créés dans le secteur de l’environnement ces dernières années, Essen ambitionne de créer 20 000 emplois verts supplémentaires d’ici à 2025. Elle s’oriente notamment vers les transports durables, un point de progression majeur pour cette métropole.

Aujourd’hui, 6 % des habitants y utilisent le vélo. L’objectif de la municipalité est d’élever ce chiffre à 25 % d’ici à 2027. Un projet d’autoroute à vélo d’une centaine de kilomètres est en cours afin de relier les villes de la Ruhr entre elles. La ville a par ailleurs engagé la réfection de 128.000 m² de routes avec un asphalte anti-bruit.

Entre autres projets pour finaliser sa transformation en Smart-City, elle compte également porter la part du recyclage dans les traitements des déchets à 65% d’ici à 2020.

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