L’un des objectifs du Pacte vert proposé par la Commission Européenne est d’atteindre une neutralité climatique d’ici 2050. Pour atteindre cet objectif ambitieux, l’Union Européenne va notamment devoir réduire de 90% ses émissions de CO2 dues au transport. Une ambition qui pourrait passer par un retour en force du secteur ferroviaire, si l’on en croit le lancement par la commission de « l’année européenne du rail » ce premier janvier 2021.

En effet, les trains émettent moins de 1% des émissions de gaz à effet de serre de l’Union Européenne et ils peuvent se vanter d’être en moyenne 27 fois moins polluants que l’avion et 33 fois moins que la voiture individuelle. Mais pour que les ménages privilégient le train à la voiture ou l’avion, faut-il encore qu’il s’y retrouvent.

Le renouveau du train de nuit pourrait être l’un des leviers les plus intéressants pour favoriser cette transition, en particulier pour se poser en alternatives aux vols intérieurs et aux trajets entre les grands centres d’attractivité en Europe sur des axes comme Paris-Berlin, Rome-Amsterdam ou encore Bruxelles-Vienne.

La moitié des passagers aériens en Europe effectuent des distances qu’il est possible de parcourir en train de nuit 

Karima Delli, Présidente de la commission Transport et Tourisme au Parlement européen


La France relancera une dizaine de lignes d’ici 2030

Alors que la France ne compte plus que deux lignes de train nuit en fonctionnement (Paris-Briançon et Paris-La-Tour-de-Carol), contre 8 en 2015 et une douzaine il y a 10 ans, le Ministre délégué aux transports, Jean-Baptiste Djebbari, a annoncé ce dimanche vouloir remettre en fonctionnement une dizaine de lignes d’ici 2030.

Parmi elles, le plan de relance annoncé en septembre dernier prévoit notamment le retour en 2021 des lignes Paris-Nice et Paris-Tarbes grâce à un financement de 100 millions d’euros qui permettra la rénovation de 50 voitures d’ici 2022. Au-delà de 2022, « compte tenu des travaux importants à réaliser sur le réseau, il sera compliqué d’en ouvrir beaucoup d’autres jusqu’en 2025 », admet le ministère.

Des financements dans le cadre du pacte vert européen qui mobilise 1 000 milliards d’euros sur dix ans pour verdir l’Europe pourraient cependant venir en complément du budget français. Car , en effet, remettre en route autant de lignes nécessite un lourd investissement pour assurer le minimum d’attractivité nécessaire pour les voyageurs : restauration, sanitaires et couchettes en bon état, prises électriques.

La relance de ces lignes de train de nuit devrait se faire autour de quatre grands « corridors » : Bordeaux-Marseille, Dijon-Marseille, Tours-Lyon via l’Ile-de-France et Paris-Toulouse. Ces propositions devraient notamment paraître dans un rapport sur les Intercités de nuit qui sera présenté prochainement aux parlementaires.

carte train de nuit europe - association oui au train de nuit
Les trains de nuit demain, un maillage européen ? – carte prospective de l’association Oui au train de nuit


Émettre 2 millions de tonnes de CO2 en moins chaque année

Durant l’été ou les vacances d’hiver, les deux trains de nuit existants en France affichent vite complets, ce qui prouve que la demande est belle et bien présente et, en mettant en fonctionnement de nouvelles lignes, le gouvernement espère bien accompagner l’évolution des mentalités et des pratiques des voyageurs.

Les signaux sont d’ailleurs positifs. Selon l’association Oui au train de nuit, la mise en place de 15 lignes nationales et de 15 lignes intra-européennes d’ici 2030 permettrait à 10 millions de passagers par an d’utiliser les trains de nuit à la place de l’avion ou de la route. Soit une économie de près de 2 millions de tonnes de CO2 par an.

Il y a également l’argument économique, qui représente également un frein autant qu’un levier en fonction du prix des billets. Mais sans dépenses de carburants, de péage, les trains de nuit représentent aussi une manière d’économiser le prix d’une chambre d’hôtel. Enfin, c’est également un sacré gain de temps et d’organisation que de pouvoir se déplacer pendant son sommeil.

Aujourd’hui, l’Autriche dispose de 28 lignes de train de nuit et a vu le nombre de ses atteindre 1,5 millions de personnes par an


Un foisonnement de lignes en Europe

Après avoir racheté en 2016 une partie des lignes allemandes, la compagnie ferroviaire autrichienne ÖBB se positionne désormais comme le leader du marché des trains de nuit en Europe. Elle assure notamment des liaisons comme Hambourg-Zurich, Rome-Vienne ou encore Vienne-Bruxelles. Aujourd’hui, l’Autriche dispose de 28 lignes de train de nuit et a vu le nombre de ses passagers doubler, atteignant 1,5 millions de personnes par an.

Ce succès en a inspiré d’autres : le Royaume-Uni et la Finlande se sont mis à investir massivement dans leur réseau et leur matériel tout comme la Suède qui a vu son trafic augmenter de 25% depuis début 2019 et qui réfléchit désormais à une ligne inter-européenne qui irait de Malmö à Bruxelles en passant par Cologne.

Fin 2020, l’Union européenne a également signé un accord de coopération entre les compagnies nationales ferroviaires autrichienne, allemande, française et suisse. Dans ce cadre, un Paris-Vienne nocturne devrait notamment voir le jour dès décembre 2021.

Si ces opérations sont de bonne augure pour réduire les émissions de CO2 du secteur des transports tout en permettant un meilleur maillage du territoire européen, des efforts sont également à produire pour « verdir » le transport ferroviaire. En France, par exemple, 50% des lignes ne sont pas électrifiées et un train sur cinq y circulant roulent encore au diesel.

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