15, 7 milliards. C’est le nombre d’œufs produits en France en 2020, selon le CNPO, le Comité National pour la Promotion de l’Œuf. Avec un tel volume, la France se positionne comme le premier pays producteur d’œufs dans l’Union Européenne. Mais comme d’autres secteurs, celui des élevages de poules pondeuses doit cependant entamer une transition profonde afin de proposer des œufs issus de poules élevées dans des conditions décentes à la fois pour le bien-être animal, mais aussi pour l’environnement.
Certes, il y a eu des avancées ces dernières années, notamment avec la promulgation de la loi EGAlim en 2018, qui a introduit la fermeture progressive de l’élevage en cages de poules pondeuses, qui représentait encore 36% des élevages de poules en 2020. Début 2022, une autre avancée a eu lieu avec l’interdiction par le gouvernement de l’élimination des poussins mâles à la naissance. Mais il y a encore beaucoup à faire. Par exemple, dans de nombreux élevages, les poules sont abattues vers l’âge de 18 mois car elles deviennent moins productives passé ce délai. Une absurdité quand on sait qu’une poule peut vivre entre 6 et 10 ans.
Alors, depuis quelques années, nous voyons émerger des initiatives pour redonner à l’élevage de poules leurs lettres de noblesse. C’était, par exemple, le cas de l’initiative Poulehouse – l’oeuf qui ne tue pas la poule – qui a permis de sauver des poules de l’abattoir. En parallèle, certains cherchent des substituts à ce produit, pour des raisons éthiques ou d’intolérance alimentaire.
Dans ce domaine, la startup Le Papondu fait figure de pionnière, puisqu’elle a réussi à mettre au point une alternative entièrement végétale à l’œuf.
Un oeuf vegan à base de fibres et protéines végétales
Alors élèves en école d’ingénieurs, Sheryline Thavisouk et Philippine Soulères se sont spécialisées dans la bio-industrie. Encore étudiantes, elles décident de travailler à la fabrication d’une alternative végétale pouvant se substituer à l’œuf. Il est en effet difficile de se passer de ce dernier tant ses fonctions culinaires et ses propriétés techniques (coagulante, liante et foisonnante) sont nombreuses.
Face au manque d’alternatives, les deux jeunes femmes décident de se lancer. Après trois ans de recherche et développement, celles qui sont désormais accompagnées par la Station F à Paris ont réussi à mettre au point un produit qui imite l’œuf et ses propriétés.
Ce dernier est composé en tout et pour tout de sept ingrédients : d’une protéine et d’une fibre végétale, d’un arôme naturel, de la carotte et du potiron pour la couleur, de l’eau et du sel. Cette liste, très réduite, était un point déterminant dans le cahier des charges des fondatrices. « Il était essentiel pour nous d’avoir des ingrédients naturels et compréhensibles pour le consommateur » précise Sheryline Thavisouk. Une recette qui semble gagnante, puisque « certains ont parfois du mal à sentir la différence avec un véritable œuf de poule » affirme l’entrepreneure.
Fortes de leur expertise en développement de produits alimentaires, le but des deux fondatrices est de proposer une alternative aux personnes allergiques ou végétaliennes. L’aspect nutritionnel n’est pour autant pas négligé dans la recette du Papondu : ce dernier ne cause pas de cholestérol et est moins calorique, pour des apports en fibres en protéines équivalents à l’œuf traditionnel. Et si l’Œuf Papondu présente encore quelques défis techniques qui freinent sa mise sur le marché, la startup propose d’ores et déjà une solution à destination des professionnels de la restauration.
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Vers une industrialisation de cette solution
Le « Papondu battu », du nom de cette solution est donc le premier produit commercialisé par la startup. Pour l’instant, il est uniquement disponible auprès des professionnels de la restauration, qui peuvent donc utiliser cette forme liquide de leur produit pour toute recette de cuisine. La marque fournit notamment des restaurants végétaliens comme Breath et Furahaa, mais également des restaurants classiques.
L’ambition du Papondu est désormais de se positionner en leader sur le marché de l’alternative à l’œuf et les deux fondatrices réfléchissent déjà à de nouveaux produits. A l’heure actuelle, ces derniers sont préparés par les fondatrices dans un laboratoire culinaire à Villejuif, c’est pourquoi startup souhaite poursuivre son développement pour pouvoir se structurer, embaucher et industrialiser le processus.