Quels sont les enjeux et les limites de la loi orientation des mobilités (LOM) qui est actuellement débattue au parlement ? La ministre des transports Elisabeth Borne présente son texte comme « une boîte à outils » permettant aux collectivités locales d’accélérer dans le déploiement des mobilités douces. Mais pour beaucoup, le texte manque de substance pour réellement avoir un impact sur les objectifs climatiques fixés par l’accord de Paris.
Le projet de #LoiMobilités est une réponse structurelle aux fractures sociales et territoriales qui minent notre pays depuis des décennies. pic.twitter.com/hIdzrfgbT9
— Elisabeth BORNE (@Elisabeth_Borne) 19 mars 2019
Ce qui a changé depuis la loi de 1982
La dernière loi fondamentale concernant l’organisation des transports en France est la LOTI (Loi d’orientation des transports intérieurs). Elle a été voté en 1982. Cependant, depuis 37 ans, la donne en matière de transport a changé de manière considérable. Durant cette période, la dépendance à la voiture s’est accrue, ainsi que l’espace public qui lui est dédié. En parallèle, l’usage du vélo s’est réduit et les petites lignes de train ont été délaissées, voire supprimées. Depuis quelques années, les temps changent. Comme le climat. Et ils nous imposent de revoir nos priorités et nos comportements en matière de déplacements. La nouvelle orientation, c’est la mobilité durable.
Or, les solutions pour une mobilité durable existent. La preuve en est avec le retour en force des réseaux cyclables dans de nombreuses villes, comme Strasbourg et Nantes par exemple. Tout comme l’arrivée de véhicules électriques et des services de partage, favorisé par de nombreuses innovations technologiques. Cependant, ces nouvelles mobilités peinent à trouver leur place dans un cadre législatif, fiscal et urbanistique qui donne encore la priorité à la voiture individuelle.
En 2019, le gouvernement d’Edouard Philippe se donne l’occasion de voter une nouvelle loi structurant les modes de déplacements. La « LOM » (Loi d’orientation des mobilités) est actuellement débattue au Sénat et le sera ensuite à l’Assemblée Nationale avant l’été. Cette loi constitue une opportunité pour sortir des carburants fossiles et donner la priorité aux modes de transport les moins polluants.
Alors que les émissions de gaz à effet de serre du secteur des transports sont en augmentation + 10 % en 2017 par rapport aux objectifs fixés, et que les ONG dénoncent un projet de loi sans cap et aux modestes ambitions, petit retour sur les trois grands enjeux de la loi orientation des mobilités (LOM) débattue au parlement.
1- Favoriser le développement des transports les moins polluants
L’enjeu principal de cette loi d’orientation des mobilités pourrait être de réduire les émissions de gaz à effet de serre du secteur des transports. À ce sujet, l’objectif de mettre fin à la vente des véhicules émetteurs de gaz à effet de serre d’ici 2040 est bien mentionné dans l’exposé des motifs de la loi. Il a cependant été supprimé du texte de loi en lui-même, ce qui est dommage. En parallèle, pour favoriser les transports les moins polluants, le gouvernement table sur des investissements structurels.
En effet, 13,4 milliards d’euros sont prévus pour la période 2018-2022 et 14,3 milliards d’euros pour la période 2023-2027. Ils seront consacrés notamment à l’entretien et la modernisation des réseaux réseaux routiers, ferroviaires et fluviaux. L’objectif est également la désaturation des grands noeuds ferroviaires et le désenclavement routier des villes moyennes. Dans le projet de loi actuellement débattu, 75% de ces investissements vont au ferroviaire. Ils sont cependant destinés en grande partie à la remise à niveau du réseau existant. À ce sujet, le texte de loi manque d’engagement concernant la revalorisation des petites lignes de trains, qui pourraient pourtant permettre de réduire l’usage de la voiture.
2- Soutenir les alternatives à la voiture individuelle
Dans ces propositions pour développer les alternatives à la voiture, le gouvernement mise notamment sur le vélo. Un fonds vélo de 350 millions d’euros sera créé. Il servira à généraliser le marquage des vélos pour lutter contre le vol. Il vise aussi à améliorer les infrastructures. Entre autres enjeux, celui de permettre le double sens cyclable en ville, de généraliser les sas vélos au niveau des feux de signalisation et de favoriser la circulation à deux de front. Ces enjeux pourraient donner plus de sécurité et d’attractivité à la pratique du vélo pour les trajets de courte distance. Enfin, une indemnité kilométrique vélo est aussi au menu afin de favoriser la pratique du « vélotaf ».
La LOM souhaite aussi inclure dans les textes un forfait mobilité. Sur le même principe que le remboursement des transports en commun par l’entreprise, le dispositif sera étendu au covoiturage et au vélo. À l’heure actuelle, il concerne uniquement les entreprises volontaires et sera non-cumulable avec les transports en commun. Un enjeu fort des discussions au parlement consiste à rendre obligatoire ce forfait mobilité.
En phase avec @Elisabeth_Borne : le nouveau forfait mobilité durable doit etre rapidement généralisé, en commençant pas les grandes entreprises ! #IKV #covoiturage #GoForIKV #LoiMobilités https://t.co/SbIm8TglgQ
— Matthieu ORPHELIN (@M_Orphelin) 18 mars 2019
Encadrer le développement du free-floating est un autre des points soulevés par ce projet de loi. Il s’agit notamment de permettre aux municipalités d’instaurer des cahiers des charges à respecter par les opérateurs. À l’instar de ce que propose la maire de Paris Anne Hidalgo à ce sujet. Le cas des engins de déplacement personnels (trottinettes électriques et gyropodes) doit aussi être clarifié en ce qui concerne le code de la route : encadrement de la vitesse ? Obligation d’emprunter la chaussée où les pistes cyclables ? Ces sujets figurent dans les débats en cours au parlement.
Enfin, la loi orientation et mobilités doit aussi accorder de nouvelles compétences aux collectivités territoriales pour organiser des services tels que l’autopartage, le covoiturage ou encore le transport à la demande. De tels dispositifs sont notamment explorées par certaines villes françaises à l’heure actuelle.
3- Accélérer le déploiement des véhicules à faibles émissions
Il faut accélérer dans le développement des véhicules électriques. Alors que la France et l’Allemagne travaillent notamment à la création d’un géant européen des batteries électriques, le gouvernement entend multiplier par 5 les ventes de voitures électriques d’ici 2022. Pour cela, la « LOM » prévoit des mesures pour inciter au développement des infrastructures. Ce qui signifie de développer notamment les bornes de recharge. Le texte de loi prévoit notamment de rendre obligatoire l’équipement de prises dans les parkings de plus de 10 places et de de réduire le coût de raccordement des infrastructures de recharge au réseau électrique.
La mise en place de zones à faible émission. L’accès à ces zones est réservé aux véhicules les moins polluants et repose sur le système de vignettes Crit’air. Les collectivités pourront définir les modalités d’accès à ces zones : périmètre géographique, véhicules concernés, modalités horaires et journalières. À noter que les conditions de mise en place de ces zones sont accessibles principalement pour les grandes villes (+ de 100 000 habitants).
Enfin, la circulation des navettes autonomes sera autorisée à partir de 2020. Aujourd’hui, de nombreuses villes françaises testent ces navettes afin d’apporter un complément à leurs offres de transports propres.