Les Horizons : Emmanuel Chauvin, comment est né Le Comptoir ?

Emmanuel Chauvin : Le Comptoir est né du constat que les entrepreneurs à impact étaient de plus en plus nombreux et avaient de plus en plus besoin de soutien pour développer leurs projets, et en particulier sur le territoire de l’Est parisien, sur le 93 et en Île-de-France plus largement.

Le Comptoir – Groupe SOS Pulse fait partie du Groupe SOS, 1ère entreprise sociale européenne qui regroupe un peu plus de 600 établissements. Ça représente plus de 20 000 salariés qui agissent sur toutes les filières de l’ESS : la santé, la solidarité, l’emploi, la jeunesse, les séniors, etc. L’idée d’avoir un incubateur au sein de ce groupe c’est de pouvoir conjuguer les forces et l’expertise de ce grand groupe avec l’agilité d’un incubateur à taille humaine. Le Comptoir accueille environ 25 entreprises par an.


Quelle est la raison d’être du Comptoir ?

Notre raison d’être c’est de donner les meilleures chances aux projets à impact social et environnemental de se développer et d’accroître leur potentiel d’impact social et environnemental.

Sur chaque programme nous avons entre 10 et 15 projets, et sur une année nous menons trois programmes, soit 30 à 45 projets qui alimentent notre raison d’être.


Présentez-nous votre spécificité, ce qui vous rend unique ?

Notre singularité c’est cette appartenance au Groupe SOS d’une part et notre situation territoriale d’autre part. Être dans le Groupe SOS permet aux entrepreneurs que nous accompagnons d’avoir un accès direct et privilégié à beaucoup d’établissements qui agissent sur les mêmes filières qu’eux. Cet accès est un potentiel commercial et de développement partenarial très fort.

Pour l’ancrage territorial, nous sommes à Montreuil, à trois stations de métro de Paris, mais pas à Paris. Nous sommes sur le territoire du 93, c’est le département le plus jeune et le plus divers de France, et donc avec une dynamique et des enjeux qui lui sont propres. Nous, incubateur sur ce territoire, avons une place de choix pour saisir ces enjeux, y apporter des réponses et accompagner les entrepreneurs. Je précise que les entrepreneurs que nous accompagnons viennent de toute l’Île-de-France et pas uniquement du 93.

Seul le programme Elles ensemble est réservé exclusivement aux femmes entrepreneures originaires de Est ensemble, la communauté d’agglomération qui regroupe les communes de Montreuil, Pantin, Les Lilas… les neuf communes de Seine-Saint-Denis immédiatement à l’Est de Paris.


Quel type d’entreprises ou de startups accompagnez-vous ?

Globalement, les entrepreneurs qu’on accompagne en sont au stade des premiers développements. Ils n’en sont plus à la phase d’idéation, quand on crée son business plan, qu’on envisage les études de marché, etc. Cette phase-là est traitée par d’autres. Nous, au Comptoir, on intervient à la phase suivante. Nos entrepreneurs peuvent avoir un premier prototype de leur produit ou de leur service et ils sont prêts à se lancer sur le marché. Nous sommes là pour les aider à développer leurs premiers résultats commerciaux.

Sur certains programmes on accompagne des entrepreneurs plus avancés, qui existent depuis plusieurs années et qui ont besoin de soutien pour structurer leur activité et passer à l’échelle. C’est le profil des entrepreneures du programme Elles ensemble, qui viennent quand elles ont déjà a minima trois ans d’exercice.

Mais sur nos principaux programmes, ce sont plus des jeunes entreprises, qui ont besoin de se lancer, qui ont besoin d’un lieu, de coaching, de mentorat. On leur propose tout cela, et au-delà on leur propose le réseau du Groupe SOS. Mais également le réseau du financement, avec un soutien au financement. Pas nous directement, mais avec les partenaires avec lesquels nous travaillons, des banques, des institutions, etc.

On accompagne des associations et des SCOP (Société coopérative de production, Ndlr), mais aussi des entreprises à but capitalistique – SARL, SAS – et on les incite à adopter le statut ESUS (Entreprise solidaire d’utilité sociale, Ndlr). Ce statut permet aux entreprises de gagner en crédibilité sur leur positionnement social et environnemental, avec des principes sociaux de gouvernance et de redistribution des revenus.

On leur offre l’accès à une communauté d’entrepreneurs engagés et un apprentissage de pair à pair. C’est sortir de l’isolement, qui pourrait être problématique pour les entrepreneurs.


Quels sont les bénéfices que les entreprises retirent de votre accompagnement ?

La première chose que les entrepreneurs retirent du programme c’est une montée en compétences. Sur les sujets qui les concernent et qui ont été définis lors du diagnostic réalisé en début de programme, sur leurs besoins et leurs enjeux. Un plan d’action est dressé et adapté à chaque entreprise avec des formations sur des compétences métier, des connaissance filières, etc.

Deuxièmement, c’est l’accès à tout notre réseau, notre réseau partenarial, notre réseau de tout l’écosystème de l’ESS, le réseau du territoire du 93 et de l’Île-de-France. Troisièmement, c’est un accompagnement aux financements, avec nos partenaires financeurs.

Quatrièmement, on leur offre l’accès à une communauté d’entrepreneurs engagés et un apprentissage de pair à pair. C’est sortir de l’isolement, parce que c’est souvent problématique pour l’entrepreneur qui peut être seul quand il travaille de chez lui. Nous organisons des ateliers de co-développement où la valeur ajoutée va être trouvée au sein même des entrepreneurs. C’est très apprécié par les entrepreneurs qui y trouvent beaucoup de valeur.

Enfin, pendant six mois ils ont accès à des locaux pour recevoir leurs clients, leurs prospects, une aide pas négligeable au vu du prix de l’immobilier en région parisienne.


Avez-vous des success stories à nous présenter ?

L’exemple qu’on donne souvent c’est celui de l’entreprise Phénix, qui est positionnée sur le gaspillage alimentaire, et qu’on a accompagnée il y a 5 ans environ. Il y a quelques mois, Phénix a réalisé une nouvelle levée de fonds d’une dizaine de millions d’euros et emploie plus de cent salariés aujourd’hui.

Plus récemment, l’an dernier nous avons accompagné Cyclo Power Factory qui en était au stade des premiers développements commerciaux. Ils sont positionnés dans le fitness utile, en transformant l’effort physique en électricité dont les bénéfices sont reversés à des associations caritatives. Grâce à notre partenariat avec We Do Good, ils viennent de boucler une levée de fonds de plus de 100 000 euros.

Nous spécialisons nos programmes d’incubation sur des filières plus spécifiques que l’ESS. Nous terminons actuellement un programme sur l’économie circulaire et la transition écologique : La Saison circulaire


Quelles grandes tendances voyez-vous apparaître dans votre périmètre d’activité ?

Nous spécialisons nos programmes d’incubation sur des filières plus spécifiques que l’ESS. Nous terminons actuellement un programme sur l’économie circulaire et la transition écologique, La Saison circulaire, et nous entamons en fin d’année un programme, La Saison solidaire. Il porte sur les projets de solidarité, notamment sur l’inclusion, l’emploi, la solidarité intergénérationnelle, de quartier.

Nous lançons La Saison solidaire dans un contexte où la solidarité a été LE mot du confinement, alors même que la crise du Covid a un impact majeur sur l’emploi. Les initiatives pour agir sur l’emploi et la solidarité n’ont jamais été aussi nombreuses. Elles viennent de toute part, des institutions, des associations mais aussi des entrepreneurs et des initiatives individuelles. Nous lançons ce programme pour accompagner les entrepreneurs qui travaillent sur la thématique de la solidarité.

Pour ce programme d’incubation sur la solidarité, dont nous ne sommes pas spécialistes, nous nous associons avec trois partenaires. Il sont tous des établissements du Groupe SOS : le traiteur Té, entreprise d’insertion ; Hacktiv, qui travaille sur l’engagement citoyen ; et Reconnect qui est actif sur le soutien aux plus précaires. L’appel à candidatures pour Saison solidaire est ouvert jusqu’au 30 novembre, pour un démarrage du programme le 6 janvier 2021 pour six mois.

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