Signe des temps qui changent, l’idée de consommer local et de saison, en participant au développement des circuits-courts, c’est aujourd’hui une des grandes tendances de notre système alimentaire. Et depuis une dizaine d’années, appuyé par l’essor du numérique, les offres de mise en relation directe entre producteurs et consommateurs se développent à grande vitesse. Pourtant, en 2010, seulement 6% à 7% des achats alimentaires réalisés en France se faisaient via des circuits-courts. Une part relativement marginale.

À l’époque, d’ailleurs, en dehors des marchés de producteurs et des AMAP, les offres ne sont pas légion et la notion même de circuit-court est loin de trouver son ancrage dans les mentalités. Pourtant, certains défricheurs y voient déjà un réel potentiel. C’est le cas des fondateurs de La Ruche Qui dit Oui (qui lanceront leur service en 2011) mais aussi de Potager City. Une entreprise qui se lance avec audace en 2007, dans la région de Lyon, sur le créneau de la commande en ligne de produits alimentaires frais et de saison.

Un pari audacieux puisqu’en 2007, la vente en ligne commence à se démocratiser mais n’est pas encore aussi développée qu’aujourd’hui. Mais un pari réussi puisque 12 ans plus tard, Potager City compte plus de 100 000 clients, 2 500 points relais partenaires, et propose aux consommateurs français des aliments issus de plus de 750 producteurs.


Saisonnalité, fraicheur et antigaspillage

«Aux débuts de Potager City, je cherchais à commander 2 kg de poires chez un producteur. La quantité lui paraissait ridicule, il m’a donc invité à acheter ces fruits au supermarché du coin…» raconte Yoann Alarçon, Co-fondateur de l’entreprise avec son frère Damien. À ses débuts, l’équipe de Potager City effectuait ses livraisons dans Lyon, en porte à porte avec un vélo triporteur. Aujourd’hui, ce qui était une start up s’est structuré et entouré, a ouvert des antennes en région, levé des fonds (400 K€ en 2014 et 7,5M€ en 2017) et lancé une offre à destination du marché B2B.

La jeune entreprise s’est développée autour de grands axes. La proximité en faisant le choix de travailler avec des producteurs locaux. La saisonnalité ensuite. Et enfin la fraicheur (l’entreprise ne stocke pas de produits alimentaires, ce qui implique de les récolter à maturité et de les livrer aussitôt, mais ce qui limite aussi le gaspillage lié aux opérations logistiques). Derrière ces trois grandes orientations, l’entreprise s’est aussi efforcée de proposer un service facilitant pour les consommateurs : un abonnement sans engagement, des recettes pour savoir comment et quoi cuisiner avec ses paniers, et enfin un maillage de points de livraison.

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panier de fruits et légumes


Les points-relais pour faciliter la livraison

L’une des force de Potager City, et ce qui fait globalement le succès d’une entreprise qui se dédie aux circuits-courts, c’est la livraison. Car même si l’objectif principal est de proposer aux consommateurs des bons produits tout en soutenant les agriculteurs, il est difficile de se lancer dans les circuits-courts sans avoir au préalable pensé à une logistique qui puisse être à la fois efficace et durable.

La durabilité de la livraison est en effet un impact à prendre en compte car circuit-court et écologie vont ensemble dans les esprits, mais pas toujours dans la pratique. D’ailleurs, l’ADEME souligne à juste titre que « plus de proximité ne signifie pas nécessairement moins d’émissions de gaz à effet de serre si les moyens de transports utilisés sont inadaptés, si la logistique est insuffisamment optimisée ou si le comportement du consommateur est inadéquat ».

Là où d’autres acteurs misent sur la création de réseaux physiques, comme des boutiques où il est possible de récupérer son panier, les dirigeants de Potager City décident de miser rapidement sur un maillage de points relais. Il devient ainsi possible de récupérer ses paniers chez des commerçants de proximité, mais l’entreprise propose aussi des partenariats innovants avec différents acteurs comme des hôtels, des stations-service ou encore des salles de sport. À Lyon, c’est aussi dans certaines stations de métro que sont installés des points-relais.

Des endroits pensés par rapport aux flux pendulaires des consommateurs et qui viennent réduire l’impact de la livraison. Car aujourd’hui, Potager City possède encore une flotte qui roule encore au diesel (avec néanmoins une vignette Crit’air de niveau 2 et un système qui permet de réduire les émissions de NO2). Mais avec 12 ans d’existence, les fondateurs de Potager City savent bien que Rome ne s’est pas faite en un jour.

panier local


Agriculture raisonnée mais pas forcément biologique

Un autre point essentiel dans l’aventure Potager City, c’est de soutenir les agriculteurs. D’abord en remettant au goût du jour la notion de saisonnalité et de produits frais. Ensuite, en mettant en avant le travail des producteurs locaux. Cependant, si l’entreprise accompagne certains producteurs dans leur transition vers une agriculture biologique, tout n’est pas 100% bio chez Potager City. Mais c’est assumé et certainement à raison.

D’abord parce que la Bio un type d’agriculture qui est, et qui restera probablement insuffisante pour subvenir à l’ensemble de nos besoins alimentaires. D’autre part parce qu’il y a encore trop peu d’exploitations bio sur le territoire français. Enfin, parce qu’il existe des alternatives qui se situent entre l’agriculture bio et l’agriculture conventionnelle et qui sont tout aussi intéressantes, bien que moins médiatisées. Ce juste milieu prend différentes formes (parmi lesquelles on peut citer l’agroécologie ou encore l’agriculture de précision) qu’on va appeler agriculture raisonnée et qui repose sur quelques fondements comme, par exemple : pas de serres chauffées, des plantations en pleine terre, et un recours aussi faible que possible aux intrants chimiques.

Aujourd’hui, la marque Potager City se développe et va notamment s’installer dans les Hauts de France et dans le Grand-Est afin d’accroître sa couverture du territoire national. Avec plus de 100 salariés et un chiffre d’affaires avoisinant les 8 millions d’euros en 2018, cette start up qui n’en est plus une prouve ainsi qu’il est possible d’accompagner producteurs et consommateurs vers un système alimentaire plus durable et respectueux du bon goût. Un modèle inspirant parmi les nombreuses formes que prend la vente en circuit-court.

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