Le secteur des transports, en France, est responsable de près de 30% de nos émissions de gaz à effet de serre. Et la moitié de ces émissions provient de l’usage de la voiture individuelle. Repenser notre rapport à la mobilité autour des mobilités douces et des transports collectifs est donc un impératif.

Dans les grandes métropoles, les réseaux de transports en commun et les infrastructures cyclables sont assez développés et permettent de se déplacer rapidement. D’autant que la majeure partie des trajets en ville font moins de 5 kilomètres. Cependant, ces mobilités douces sont plus difficiles à mettre en place dans les territoires ruraux, qui pâtissent de distances plus importantes et d’une faible desserte en transports en commun.

Ainsi, pour les 33% de français-es qui vivent en milieu rural (INSEE, 2017), la voiture individuelle constitue le principal moyen de locomotion. En absence d’un effort significatif des collectivités et de l’État pour renforcer les transports en commun entre zones rurales, la solution pour une mobilité bas-carbone dans ces territoires réside donc dans le réflexe du covoiturage. Un sujet sur lequel s’est justement positionné la startup Atchoum.


Un projet social pour réduire l’isolement

Constatant l’enclavement de certaines communes rurales et le manque de services dédiés à la mobilité sur le territoire, Vincent Desmas fonde Atchoum en 2015. La plateforme, qui facilite la mise en relation des personnes souhaitant se déplacer avec un conducteur, permet aux collectivités de répondre de manière précise à des besoins de mobilité de proximité.

« L’accessibilité des transports est la première préoccupation des élus locaux [dans les petites communes, ndlr] » rappelle Vincent Desmas, co-fondateur de la startup, tout en insistant sur l’enjeu social que constitue un tel service. La force d’Atchoum réside ainsi dans sa proposition : une solution de transport solidaire en milieu rural, adaptée aux besoins des populations concernées.

Très prisée des personnes âgées isolées ainsi que des personnes ne possédant pas de voiture, Atchoum propose ainsi deux types de prestations : le covoiturage pour des déplacements occasionnels ; et des trajets solidaires qui permettent à chacun d’effectuer des allers-retours sur de courtes distances (maximum 50km), développant ainsi le « courvoiturage ».

En outre, la plateforme peut se targuer d’avoir développé un service qui, contrairement à la majeure partie de ses concurrents, ne repose pas exclusivement sur l’accès à internet. Une manière de prendre en compte la fracture numérique et de s’adapter aux besoins des personnes âgées. Le centre d’appel téléphonique de la startup, qui permet d’indiquer sa destination et son lieu de départ, permet ainsi de mettre en relation le passager avec les conducteurs inscrits localement, sans avoir à passer ni par l’application mobile, ni par le site internet.


Une initiative qui s’adresse avant tout aux collectivités

Soutenue par de nombreuses institutions (Malakoff Humanis et AG2R La Mondiale notamment), Atchoum s’est vue récompenser maintes fois. En 2017, elle obtient le Prix de l’innovation au Salon des Maires et prend véritablement son envol lorsqu’elle est sélectionnée pour rejoindre l’incubateur Euratechnologie en tant que coup de cœur du groupe PSA. Plus tard, elle fait partie des trois startups sélectionnées à la clôture des Assises de la Mobilité (catégorie « Mobilité zone peu dense ») et sort lauréate du concours 10 000 startups pour changer le monde (2019).

Basée dans le Var, la structure s’est assuré une présence dans d’autres régions de France (Massif Central, Sud-Est…) et cherche actuellement à étendre sa couverture nationale. Elle s’adresse pour cela essentiellement aux collectivités locales, qui peuvent s’abonner à la plateforme, à raison de 360 euros par an pour 1 000 habitants, donnant ainsi accès au service à l’ensemble de la commune. Les conducteurs sont quant à eux rétribués par le passager à hauteur de 35 centimes le kilomètre. Un tarif dégressif s’applique pour les trajets les plus longs.

Des tickets mobilité sont également vendus par Atchoum aux collectivités (1,25 euro par ticket, vendus par carnets de dix) qui peuvent ensuite les distribuer à leurs administrés. Ce dispositif permet ainsi de faciliter l’accès des personnes âgées au service, compte tenu des nouveaux dispositifs de sécurisation des paiements développés par les banques, parfois peu faciles d’utilisation. Véritable levier, ces tickets permettent de financer plus de la moitié des trajets réalisés à ce jour.


Décarboner les transports en milieu rural

Largement plébiscité et encouragé par la Loi d’orientation des mobilités (2019), la fonction sociale du covoiturage se double aussi d’un enjeu environnemental. Dans ce cadre, le covoiturage pourrait être une réponse au défi posé par la mobilité durable dans les lieux enclavés. Le Shift Project, par exemple, estimait ainsi en 2018 que le recours généralisé au covoiturage (et au vélo) dans les zones périurbaines permettrait de réduire de 60% les émissions de gaz à effet de serre.

Encore très récemment, en réponse à la hausse du prix des carburants liée à la guerre en Ukraine, l’Agence Internationale de l’Énergie a proposé 10 pistes d’actions pour se passer du pétrole, qui incluent le développement du covoiturage.

A plus grande échelle, des initiatives comme celle d’Atchoum apportent une réponse pertinente aux enjeux de mobilité durable en milieu rural. De surcroît, celle-ci permet d’améliorer l’accès aux soins, aux commerces et à l’emploi dans ces zones tout en créant du lien social : les passagers choisissent souvent les mêmes conducteurs, qui vont même parfois jusqu’à aider leurs passagers dans leurs activités. Un fonctionnement gagnant sur tous les plans pour redynamiser nos territoires.

À lire également sur le sujet