C’est quoi le greenwashing ?

Le Greenwashing, c’est un anglicisme qui peut se traduire en français par « éco blanchiment ». Il s’agit d’une technique de communication marketing menée par des entreprises qui s’auto-décernent une image vertueuse et respectueuse de l’environnement sans l’être réellement dans les faits.

En clair, il s’agit d’un message essentiellement publicitaire et largement trompeur. Le Greenwashing consistait d’abord à valoriser les propriétés écologiques d’un produit ou d’un service. De plus plus, s’applique aussi à des éléments de communication “corporate” qui mettent en avant les valeurs de l’entreprise, voire d’autres éléments structurants comme la couleur et la forme d’un logo.

Ce “marketing vert” vante de manière trompeuse et insidieuse une prétendue résilience environnementale d’entreprises qui seraient devenues des acteurs de la transition écologique. Des pratiques que l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie) et l’ARPP (Agence de Régulation des Professionnels de la Publicité) combattent ensemble. Avec le soutien d’Associations mais aussi de collectifs citoyens.


Pour aller plus loin

Au début des années 1990, les annonceurs vantaient des lessives sans phosphates ou des piles sans plomb. Les parfums en aérosols étaient supposés protéger la couche d’ozone. Plus ou moins « écolo » cette communication annonçait la grande vague des produits « naturels » qui a déferlé sur les consommateurs au tournant des années 2006/2007. Comme le souligne Anne Charon de l’ARPP, « les études ont montré que les messages à caractère « vert » avaient été multipliés par trois en une seule année ». C’est ainsi que le terme de Greenwashing s’est généralisé et que l’organisme EnviroMedia Social Marketing en s’associant à l’Ecole de journalisme et de Communication de l’Université d’Oregon, a fondé le Greenwashing Index. Un outil de mesure qui cerne la communication des entreprises américaines en leur attribuant une note.

En France, des ONG se sont mobilisées pour contrer l’éco blanchiment en créant le Prix Pinocchio du Climat. (Les Prix Pinocchio du climat sont organisés par la fédération des Amis de la Terre France en collaboration avec le CRID et le Peuples Solidaires-Action-Aid France). Une réponse très ironique que détestent les grandes entreprises épinglées. D’autant que le Prix Pinocchio se décline désormais en trois catégories. La mention « Plus vert que vert » est attribuée à la campagne la plus mensongère. « Mains sales, poches pleines » épingle la multinationale dont les investissements sont corrosifs pour l’environnement mais ô combien bénéfiques pour ses actionnaires. Et la médaille « Une pour tous et tout pour moi » récompense l’entreprise dont la politique d’investissements est la plus néfaste pour les populations locales. Entre 2008 et 2015, une soixantaine d’entreprises ont ainsi été « primées »

Les mécanismes du Greenwashing sont nombreux et relativement facile à mettre en oeuvre, d’autant plus qu’ils répondent parfaitement aux attentes des consommateurs. Que penser par exemple, de ces marques de vêtements qui vantent sur leurs nouveaux produits un “cuir vegan” ? Idéal pour le consommateur engagé, sans avoir besoin d’expliquer que le cuir végan est en fait un ensemble de matériaux issus du plastique… Que penser de ces entreprises qui “compensent” leurs émissions de CO2 en plantant des arbres partout mais qui continuent, en parallèle, de polluer ? Que penser des ces supermarchés qui vantent des tomates bio produites sous serres chauffées dans le sud de l’Espagne ?


Les consommateurs ne sont plus dupes

Si les entreprises redoutent désormais d’être lisibles en raison de leur Greenwashing trop grossier, les DRH réalisent qu’un autre danger les guette. Ce sont cette fois-ci les futurs cadres issus des Grandes Ecoles qui se rebiffent et rechignent à servir des entreprises incompatibles avec le futur du genre humain. 

C’est ainsi qu’en ce mois de Novembre 2019, les étudiants du manifeste pour un réveil écologique, associés à Génération Climat, viennent de publier un guide anti-greenwashing pour choisir leur futur employeur. Ainsi que le souligne Claire Egnell, étudiante à Sciences Po et à l’ENS, « ces outils vont permettre de concrétiser notre engagement environnemental ». Ces jeunes et futurs diplômés en sont convaincus, ils n’iront pas travailler au service d’entreprises qui ne prennent pas en compte les problématiques environnementales actuelles. Pour Nathalie Devulder Directrice RSE chez RTE, « ce manifeste est un signal qui doit nous interpeller et qu’on doit prendre en compte ».

Le 20 Septembre dernier, la Grève Mondiale pour le Climat a mobilisé une multitude de jeunes à travers le Monde pour sonner l’alarme climatique. À cette occasion, de très nombreuses entreprises ont autorisé leurs collaborateurs (certaines les ont même incités) à rejoindre les manifestants. Au-delà de leur image, ces entreprises semblent avoir réellement pris conscience qu’il n’y avait, effectivement, pas de « Planète B » et que leur croissance et leur bonne santé économique n’avaient strictement aucun sens dans un monde devenu, au sens propre du mot, irrespirable. Plus de 200 entreprises se sont ainsi engagées à revoir leur business model pour qu’il soit compatible avec les exigences du réchauffement climatique.

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Le piège de la compensation et l’émergence de la mesure d’impact

Dans les entreprises les moins concernées, des groupes de salariés se mobilisent pour inciter (ou contraindre ?) leurs dirigeants à se pencher sur la question. Face aux pressions des salariés, des consommateurs, les uns comme les autres étant des citoyens, nombre de grandes entreprises ont annoncé leur neutralité carbone d’ici 2050. Le groupe Total finance la reforestation en Guyane. Danone compense à 100% le bilan carbone de ses emballages en plastique Evian. Air France aura sur ses vols intérieurs (environ 500 sur ses 2000 vols quotidiens) un bilan carbone neutre dès 2020. Cependant, cette logique du “faire moins pire” n’entraîne pas nécessairement ces entreprises sur la route du “faire mieux”.

C’est ici une nouvelle forme de greenwashing qui est entrain de se démocratiser via le piège de la compensation. Un piège car la compensation est une pratique largement insuffisante et dont les effets servent davantage la communication de certains groupes plutôt que la planète. Sur le papier, la pratique est formidable : j’émets X tonnes de CO2, donc je plante X milliers d’arbres qui capteront ce CO2 et ainsi, mon empreinte carbone est compensée. Imparable, d’autant que le consommateur adore qu’on plante des arbres. Mais largement insuffisant en raison de différents facteurs (le temps nécessaire à la croissance de l’arbre, par exemple) et qui, surtout, n’incite pas ces entreprises à réellement réduire leur impact en premier lieu. La compensation permet surtout de se “laver les mains” du problème climatique tout en se donnant une belle image.

Pour contrer cela, de plus en plus de jeunes entreprises décident de miser sur la transparence et la preuve d’impact plutôt que sur les discours. C’est le cas des entreprises à mission qui, dès leur création, vont s’orienter uniquement sur des pratiques durables et vertueuses. Dans leur sillage, la transparence prend une place de plus en plus importante dans nos sociétés. À titre d’exemple, on peut citer le succès extraordinaire de la marque Yuka, qui pousse des distributeurs à revoir la composition de leurs produits. Cette transparence basée sur la donnée et non plus sur du déclaratif nous amène à une pratique en train d’émerger : la mesure d’impact. Une pratique qui va plus loin que la RSE et qui permet de quantifier les impacts positifs qu’une entreprise va avoir sur la planète. Une manière de prouver et démontrer les choses plutôt que d’en parler. Ce qui est toujours préférable.

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